Goodyear-Titan: « le cow-boy » a raison
On sait que les hommes d’affaires américains aiment parfois jouer aux cow-boys et n’hésitent jamais à dégainer pour tirer plus vite que leur ombre. Mais dans le genre western, le patron de Titan, Maurice Taylor, a fait très fort en prenant Montebourg pour un chef indien déplumé.
L’usine de pneus Goodyear d’Amiens est, depuis des mois, au bord de la faillite et donc menacée de fermeture. L’Américain Titan, l’un des géants mondiaux du pneu, est venu voir s’il pouvait envisager une reprise du site. Le patron, Taylor, a visité l’usine et rencontré les syndicats. Il est reparti en courant. Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif, ne trouvant personne d’autre pour sauver l’entreprise, a demandé à Titan de revenir à la table des négociations.
Les Echos de ce matin publient la réponse de Taylor. Elle est d’une violence épouvantable. L’Américain traite les ouvriers de paresseux qui, bien payés, ne travaillent que « trois heures par jour », les syndicats de « fous » qui lui auraient répondu qu’en France « c’était comme ça » et le gouvernement d’incapable qui, « ne voulant pas faire de vagues », ne prend aucune mesure pour faire face aux produits chinois.
Et il conclut : « Nous ne sommes pas assez stupides » pour nous intéresser à une telle entreprise et « vous pouvez garder vos ouvriers ».
On attend naturellement avec impatience la réponse de Montebourg.
Cela dit, au lieu de nous indigner de la brutalité et du cynisme de Taylor, nous ferions sans doute mieux, en ayant en tête notre taux de chômage, notre manque de compétitivité et le déficit de notre balance commerciale, de nous demander si « le cow-boy » n’a pas un peu raison.
Dire que nos ouvriers « ne foutent plus rien » est évidemment injuste. Ils sont généralement prêts à travailler pour peu qu’ils aient du travail et la productivité des salariés français est plutôt reconnue. L’ennui c’est qu’ils fabriquent, le plus souvent, des produits dépassés, obsolètes et donc invendables. Mais c’est de la faute de leurs entreprises qui, écrasées de charges, n’ont plus les moyens ni même la volonté d’investir dans la recherche et l’innovation. Or, face à la concurrence et vu les coûts de production qu’impose notre système, seuls de nouveaux produits de qualité et à la pointe du progrès nous permettraient de retrouver une place sur le marché mondial.
Dire que les syndicats ne jouent pas le jeu est une évidence. Ne représentant que 7% des salariés français (et encore très majoritairement les fonctionnaires) ils en sont toujours à la lutte des classes et préfèrent défendre, bec et ongle, des « avantages acquis », dépassés par les événements, plutôt que de participer, avec le patronat, à la révolution du monde du travail qu’impose la mondialisation.
Dire que le gouvernement, pour ne pas faire de vagues, se refuse à prendre les moindres mesures de protectionnisme face au déferlement des produits venant des pays dits « émergeants » (et qui ont émergé depuis longtemps) est une autre évidence.
Avec l’espoir, souvent vain, de vendre quelques Rafales, des Airbus et des centrales nucléaires, nous avons ouvert nos frontières, nos grandes surfaces et nos échoppes les plus modestes à tout ce que produisent, à bas prix parce qu’à bas coût, deux à trois milliards de Chinois, d’Indiens, de Coréens, de Philippins, de Vietnamiens. Pire encore, nous acceptons, le sourire aux lèvres, que ces pays ne respectent pas les règles du commerce mondial que nous suivons nous-mêmes à la lettre.
Taylor reconnait d’ailleurs dans sa lettre à Montebourg qu’aux Etats-Unis il a dû se battre contre le gouvernement américain pour obtenir un minimum de protection face à la concurrence chinoise.
En fait, dans sa lettre explosive, Taylor s’en prend beaucoup plus au gouvernement qu’aux salariés. Et là il a totalement raison. Au lieu de les trainer dans la boue puis de faire la danse des voiles devant les grands patrons étrangers et de faire le mariole en vantant le « made in France », le ministre du Redressement productif ferait mieux de lire attentivement le courrier de Maurice Taylor. Pour une fois que quelqu’un lui dit la vérité en face…
Mots-clefs : Goodyear, Montebourg, Taylor, Titan
20 Fév 2013 13:02 1. Gilles
Ouaip. Ca fait mal. Notre minustre du Dégraissement Réductif en prend plein la tête. On aura bien entendu la réponse, naturellement écoeurée de la CGT, énorme fossoyeuse d’entreprise d’un côté, et multi-condamnée dans tous ses procès vis à vis de ses militants.
Mais d’emploi, on n’en aura point.
Le Socialisme dans toute sa splendeur, misère (garantie et pour tous). Allez mes chers syndicalistes, allez poser des tracts payés par les patrons. Et surtout : ne changez rien. Goutez les fruits amers de votre bêtise.
20 Fév 2013 13:46 2. Flyin'Dutch
Nos entreprises ne sont pas compétitives, soit. Mais s’en prendre aux ouvriers est vraiment dégueulasse. Vous l’avez dit, ce sont les décideurs qui ont plusieurs trains de retard qui sont fautifs, incapables de voir que ce qu’ils cherchent à vendre est dépassé. Maurice Taylor aurait dû s’en prendre à ses homologues plutôt qu’à ces ouvriers qu’il ne connaît même pas, mais les loups ne se mangent pas entre eux. On reconnaît bien la mentalité de ces patrons qui s’en mettent plein les fouilles sur le dos d’ouvriers qu’ils considèrent comme du bétail.
20 Fév 2013 15:09 3. Patrick-Louis Vincent
Taylor a parfaitement raison. Il ne s’en prend pas aux ouvriers qu’il n’a pas vu, mais à ceux qui les représentent, les cégétistes de Good Year avec lesquels il a discuté. Partout où la CGT est dominante, les entreprises finissent par couler. On l’ a bien vu au port de Marseille, ville qui avait tous les atouts pour devenir le plus grand port de la Méditerranée, et qui, du fait de l’obstruction systématique des dockers cégétistes, s’est vu dépassé par Barcelone. On l’a aussi vu à la SNCM ou aux MNPP.
La réforme syndicale est devenue une urgence. Tant que la représentation syndicale ne pourra être le fait que des syndicats issus de la Libération, rien ne changera en France. La France est encore figée à la Libération. Elle n’est pas rentré dans le monde post-moderne. Elle n’y rentrera que quand elle touchera le fond sur le plan économique et que le pouvoir politique qui domine le pays depuis 40 ans se sera écroulé. Ce n’est qu’une question de temps.
Taylor a donc raison. Il laisse le gouvernement se débrouiller avec la CGT. Pendant ce temps Good Year disparaîtra, ce qui fera le bonheur des firmes étrangères.
20 Fév 2013 17:12 4. bentolila
Non je ne suis pas contente, mon anis Arnaud de montedevantbourg est choque. Même Elise mamie lucette est déprimée.
20 Fév 2013 19:22 5. bertgil
Dans une entreprise quand ça va mal, ce n’est jamais la faute des ouvriers.Ce serait trop facile,Les responsables sont, la direction générale, le conseil de surveillance, le conseil d’administration.Les décisions ou non décisions ce sont eux qui les prennent.Donc dans une sté quand ça ne va plus ce sont les organes de directions qui n’ont pas fait leur travail.Ce ne sont certainement pas les syndicats.
Quelques bémols.Lorsque le dollars et d’autres monnaies se déprécient de 10, 20% en quelques mois.Vous pouvez faire ce que vous voulez.Vous avez un boulet insupportable.Les solutions seront soit, baisse des salaires, soit délocalisations soit fermeture.Bien entendu si vous produisez des produits que vous étes le seul à produire, comme l’Allemagne ou quelques autres,alors les clients devront payer.
Des solutions existent.Sortir de l’euro, ou protéger les secteurs en difficultés avec des droits de douane.Sans ces solutions c’est la mort aasurée de l’économie française.
20 Fév 2013 20:21 6. abenaton
@ bertgil
Pas d’accord! Trop facile de ne pas impliquer les « ouvriers » toujours gentils contre les méchants patrons.
Chez Spanghero, AUCUN ouvrier n’a vu que la viande de bœuf n’en était pas ? AUCUN comptable ne savait lire les bordereaux de livraison ? Aucun contrôleur financier n’a vu les transactions louches ?
300 vierges.
A titre personnel, j’ai subi, adolescent, les menaces de la CGT dans une usine d’avionique : le premier qui ajoute une minute à son temps de travail sera boycotté par le reste du personnel, jusqu’à ce que désespoir mène à démission … volontaire! Un vieux truc de sal…ards communistes ! Tout le monde sait çà à la SNCF, à la RATP, aux messageries de presse comme à l’ANPE!
Le roi est nu !!!!
Personne ne le voit ???? Vraiment personne ?
L’hypocrisie est HEUREUSEMENT une maladie de civilisation mortelle.
20 Fév 2013 21:20 7. dodo
flamby doit jouir comme un porc !
vous pariez combien ?
j’en viens presque à prendre montebourg en pitié, le pauvre minus.
21 Fév 2013 10:24 8. Patrick-Louis Vincent
@bertgil
Vous sous-estimez beaucoup le pouvoir de nuisance de la CGT.
Mais ce syndicat coulera avec le Titanic pour ne pas avoir voulu prendre à temps les canots de sauvetage. L’ennui c’est qu’ils feront couler tous les autres passagers à bord.
22 Fév 2013 14:20 9. aline
Thierry, ça n’est pas très bien de donner raison à cet américain pour qui le coût « normal » d’un travail doit s’apparenter à celui d’un ouvrier du Bangladesh payé en roupies et avec un lance pierre, tout en n’étant soumis à aucune mesure de protection, tant sociale que sanitaire…
Les ouvriers de France ne font rien ??? La productivité de nos travailleurs est reconnue (pas par le MEDEF qui la tait tranquillement) comme une des plus importantes en union européenne soviétique.
Ils sont très bien payés ??? Que tous ceux qui estiment que 1500 euros par mois est un bon salaire, aillent donc vivre avec ça et travailler à la chaine aux 3/8 et de nuit par dessus le marché (et surtout, que cessent de nous donner des leçons de travail et de salaire, ceux qui n’ont que rarement pratiqué le premier, et affichent le second dans des sphères inimaginables au commun des mortels).
C’est une simple nouvelle attaque en règle pour mettre en place les pratiques libérales exacerbées qui sont déjà à l’œuvre dans toute l’union, où en Allemagne on bosse pour un euro de l’heure, et où en Grèce on saute par les fenêtres…
Quand tout le monde aura baissé son salaire de 30%, (comme l’exigent les Etats Unis), quand le minimum des retraites sera à 200 euros, quand on pourra virer n’importe qui et faire n’importe quoi de ceux qu’on utilise comme des torchons, les américains seront satisfaits, c’est pour cette raison qu’ils lancent l’offensive, leur union douanière avec notre si belle et bonne Europe des lobbies étant en cours pour la grande braderie et la découpe à l’encan finale de notre pays.
Non, ce monsieur n’a pas raison, où et quand avons nous perdu en France l’idée qu’une juste rémunération, un salaire décent, une protection adéquate, et une humanité avec un employeur honorable (à quand le retour de la schlague, puisqu’il ne faut même plus parler, mais marner, marner jusqu’à en crever, pour enrichir les parasites que sont les actionnaires ???).
Non, ce goût que vous avez pour le retour vers l’enfer, sous couvert de crise économique, des petites gens, ne vous honore pas, et j’en suis vraiment navrée.
Enfin, les Etats Unis en faillite complète, qui ne survivent que grâce à la la variable d’ajustement qu’est devenue pour eux la zone euro et de sa souffrance, n’ont vraiment aucune leçon d’économie à donner à qui que ce soit en la matière.