Au soir du second tour des élections régionales, tous nos experts avaient été catégoriques. Les choses ne pouvaient plus continuer comme avant. Il fallait, de toute urgence, que nos politiciens de tous poils comprennent enfin que les Français ne supportaient plus ce bipartisme qui durait depuis des décennies et qui nous imposait une alternance d’incapables qui avaient conduit le pays à la catastrophe.

La « victoire » du Front National qui était devenu le premier parti de France (même si, après n’avoir gagné aucun département, il ne gagnait aucune région) démontrait qu’un grand nombre d’électeurs –du moins parmi ceux qui s’étaient déplacés pour voter- souhaitait donner un bon coup de balai dans notre microcosme politique et exigeait de nouvelles têtes, de nouvelles mœurs, de nouvelles idées.

D’ailleurs, dès le lundi matin, tous les héros de notre petit théâtre de marionnettes multipliaient, la main sur le cœur, les déclarations, affirmant qu’ils avaient parfaitement compris « le message des Français » et qu’ils allaient « immédiatement en tirer toutes les leçons » qui s’imposaient.

Or, à quoi a-t-on assisté depuis ? Soyons simples, à un retour à… la IVème République ! De François Hollande à Jean-Pierre Raffarin, en passant par Manuel Valls et NKM, tout le monde évoque à demi-mots une « recomposition du paysage politique » ce qui signifie très clairement des combines, des alliances, des magouilles, des tripotages, tout et n’importe quoi simplement pour trouver une pseudo majorité capable non pas de sauver la France mais… d’endiguer la montée du Front National.

A entendre les vociférations de ces « ténors », « droite » et « gauche », socialisme et libéralisme ne voudraient plus rien dire car désormais la France se diviserait entre « pro » et « anti » FN et plus rien d’autre ne compterait. C’est d’ailleurs ce qu’affirme, depuis longtemps, Marine Le Pen elle-même quand elle prétend qu’il n’y a plus que, d’un côté, « les patriotes » et, de l’autre, « les mondialistes ».

A l’Elysée, on voudrait nous faire croire que, face au « péril fasciste », une gauche à la sauce hollandaise va, tout naturellement, pactiser (et même se pacser) avec une droite ramollo-centro-raffariniste incarnée aussi bien par l’ancien Premier ministre de 2002 que par le nouveau président de la région Nord-Pas de Calais-Picardie, Xavier Bertrand. Le tout avec, bien sûr, la bénédiction du Grand Orient.

Face aux succès des Poujadistes, la SFIO de Guy Mollet tend la main aux radicaux-socialistes de Mendès pour former un gouvernement de coalition ! Voilà qui donnerait un coup de jeune au pays !

Il va sans dire que, pour Hollande, ce scénario serait inespéré puisqu’il rejetterait Sarkozy dans le camp des extrêmes et éliminerait le « vieux » Juppé en le faisant remplacer, au centre du terrain, par Hollande lui-même.

Certes, les mœurs souvent douteuses de nos caciques politicards nous sont devenues insupportables et nous aimerions bien, tous, découvrir de nouvelles « gueules » avec de nouvelles idées, mais qui pourrait croire un seul instant aux fariboles de « l’Union sacrée » et imaginer que, même pour s’opposer à la menace d’une Marine Le Pen, les électeurs de Mélenchon et ceux de François Fillon, par exemple, pourraient se retrouver comme un seul homme sous la bannière de Hollande ?

Certains ont beau tenter de nous raconter que le FN et Daesh sont comparables, « l’Union sacrée » peut –peut-être- se former contre l’Islamisme mais elle n’a aucune chance de voir le jour contre Marine Le Pen. Pour les Français, le chômage, les impôts, la dette, la déliquescence de l’Etat sont autrement plus dangereux que le FN et avoir comme seul programme la lutte contre Marine Le Pen n’est évidemment pas suffisant. Voire même totalement ridicule.

Même si la droite a bien souvent mené une politique de gauche et même si la gauche tente aujourd’hui, avec Valls et Macron, de mener une politique de droite, pour les Français, la droite qui devrait libérer l’économie, les initiatives, les citoyens et la gauche qui ne pense qu’à augmenter les impôts, aggraver les lois et les règlements et multiplier le nombre des fonctionnaires sont deux « mondes » que tout sépare.

Il faudrait d’ailleurs rappeler aux nostalgiques de « l’Union sacrée » que si Mollet et Mendès ont bien réussi à éliminer le danger poujadiste de 1956, l’histoire s’est tout de même terminée, au joli mois de mai 1958, par un coup d’Etat militaire à Alger. Et l’ennui c’est qu’aujourd’hui il n’y a plus personne à Colombey-les-deux-Eglises.

Et là-dessus, cerise sur le gâteau, qui voit-on ressortir de sa boite ? Bernard Tapie en personne, le symbole de la gauche caviar de Mitterrand…