Ce n’est pas facile d’être au pouvoir mais être dans l’opposition n’est pas non plus de tout repos. D’ailleurs personne n’osera dire que, depuis que la gauche règne sur le pays, la droite ait fait des étincelles. C’en est à se demander lesquels sont les plus mauvais, des socialistes menant une politique qui conduit le pays à la ruine ou de l’UMP qui, après nous avoir offert sa bataille de chiffonniers (qui n’est toujours pas finie) bredouille, bafouille et se contredit sur à peu près tous les sujets.

Nathalie Kosciusko-Morizet incarne la droite au Conseil municipal de Paris. Battue par Anne Hidalgo, après avoir mené une campagne souvent maladroite, NKM harcèle en permanence sa rivale victorieuse, tout en se préparant, évidemment, à un avenir qu’elle imagine plus glorieux.

C’est, bien sûr, son rôle que de mener la vie dure à l’héritière de Delanoë. Mais il ne faudrait pas que cette opposition systématique la conduise à adopter des postures qui la feraient passer (et avec elle la droite en général) pour totalement ringarde.

Le piège est énorme et d’autant plus que, dans une vie précédente, la même jeune femme, alors qu’elle était ministre, avait joué les écolos de service ce qui, bien sûr, l’avait déjà sérieusement ringardisée. On se souvient que, ministre de l’Ecologie et voulant plaire aux adeptes de la lampe à huile et de la marine à voile, elle avait condamné et interdit l’exploration et a fortiori l’exploitation du gaz de schiste.

Il est évident que, dans quelques années, quand les Etats-Unis auront acquis une totale indépendance énergétique grâce au gaz de schiste et que Total fera fortune grâce à ce même gaz de schiste que la société française exploitera en Grande-Bretagne, les Français condamneront sans pitié tous ceux qui, chez nous, se seront opposés à l’exploitation de ce fabuleux trésor enfoui sous notre sol et nous auront fait rater une chance inespérée de sortir du marasme. On brûlera alors sans doute NKM en effigie dans nos rues, sans lumières.

Mais têtue comme pas deux et sans se rendre compte que l’écologie est passée de mode et ne paie plus depuis déjà quelque temps, NKM vient d’aggraver son cas et prenant la tête d’une croisade « anti tours » dans la capitale.

Hier, elle a réussi à entrainer une majorité du Conseil de Paris (UMP, UDI, Parti de gauche et Verts) qui, par 83 voix contre 78, a bloqué le projet de la tour Triangle.

Conçue par deux architectes célèbres, Jacques Herzog et Pierre de Meuron, cette tour devait être construite à la Porte de Versailles (loin donc du centre historique de la capitale), avoir 180 m. de haut (30 de moins donc que la Tour Montparnasse) et offrir 80.000 m2 de bureau. Elle devait surtout donner un sérieux coup de jeune, sur le plan architectural, à notre bonne vieille capitale.

Certes, ce projet a été lancé par Bertrand Delanoë, mais en s’y opposant et en faisant de ce combat la première de ses batailles, NKM se rend-elle compte qu’elle entre brutalement dans la galerie des portraits de toutes les vieilles barbes qui se sont opposées à la Tour Eiffel, au métro, aux chemins de fer, à l’aviation, à la machine à café et à tous les progrès des deux derniers siècles.

En voulant trottiner derrière Eva Joly et Cécile Duflot pour être à la mode, la belle polytechnicienne se fourvoie dans toutes les contradictions de ces planteurs de choux au point de se déclarer à la fois en faveur du mariage pour tous et contre les tours, tantôt au nom du modernisme, tantôt au nom de la sauvegarde de valeurs du passé.

Qu’elle continue à se faire doucement hara-kiri en copinant avec les verts et le Parti de gauche serait strictement sans importance si cette attitude pour le moins surprenante ne ringardisait épouvantablement la droite et ne paralysait la capitale.

Paris n’est plus, depuis longtemps déjà, la Ville-Lumière, la capitale des Arts et des Lettres. Elle est distancée par Londres et maintenant par Berlin. Or, ces deux villes construisent, bâtissent, innovent à tour de bras, de pelleteuses et de grues, avec des tours toujours plus hautes et plus audacieuses. Paris se recroqueville, se ratatine, devient une ville-musée poussiéreuse qui s’imagine que la culture c’est la Gay-pride et l’avenir le vélib’.

Bien sûr, cela fait mal au cœur de dire qu’Anne Hidalgo a raison. Alors contentons-nous de dire que NKM a totalement tort de ringardiser ainsi la droite parisienne avec son opposition absurde –comme peuvent l’être les écolos- aussi bien au gaz de schiste qu’aux tours parisiennes.