Il parait, d’après nos plus hautes autorités, qu’il ne faut plus parler de « l’Etat Islamique d’Irak et du Levant » parce que ces « fous de Dieu » qui terrifient maintenant non seulement le Proche-Orient mais aussi l’Europe et l’Amérique qui leur ont déclaré la guerre n’auraient… pas d’Etat et qu’ils ne seraient… pas islamiques.

Ils n’ont peut-être pas d’Etat mais ils contrôlent tout de même toute la moitié nord de l’Irak (à l’exception du Kurdistan) et une bonne partie de l’est de la Syrie, soit un territoire plus grand que la Jordanie et les bombardements de l’aviation américaine et accessoirement de l’aviation française ne les empêchent toujours pas de continuer à avancer victorieusement et vers Bagdad et vers le cœur de la Syrie. D’autre part, même si cela ennuie un peu le recteur de la mosquée de Paris, ils sont bel et bien islamiques, pour ne pas dire islamistes, c’est-à-dire musulmans.

Maintenant, nous disent en chœur Hollande, Valls, Fabius, Le Drian et Cazeneuve, il faut dire « Daesh ». C’est plus rassurant, pensent-ils sans doute. Ce qui est amusant c’est que Daesh n’est rien d’autre que l’abréviation en arabe de « Etat islamique d’Irak et du Levant ». A croire qu’à l’Elysée, à Matignon, au Quai d’Orsay et place Beauvau, nous n’avons plus un seul arabisant ! A moins que nos dirigeants nous prennent vraiment pour des imbéciles. Mais jouer ainsi sur les mots permet aussi et surtout à nos bons esprits d’en profiter pour nous dire que l’Islam est une religion d’amour et de tolérance puisque les gens de « Daesh » n’auraient rien à voir avec l’Islam.

D’ailleurs, ils ne sont plus 20 ou 30.000, comme on nous le disait jusqu’à présent, mais maintenant, parait-il, 90.000. Ce qui est plutôt inquiétant.

Si l’on comprend bien ce qu’on nous raconte, l’Occident, incarné par Washington et Paris, fait donc, avec la bénédiction de quelques roitelets pétroliers du Golfe, la guerre à un « groupuscule » qui contrôle des puits de pétrole et un vaste territoire, sans avoir pour autant d’Etat, avec 90.000 terroristes armés jusqu’aux dents et dotés d’un matériel ultrasophistiqué et qui ne sont pas musulmans puisque le Coran n’aurait jamais toléré que les fidèles d’Allah décapitent les Chrétiens.

On se demande parfois pourquoi, depuis plus d’un demi-siècle, cet Occident a perdu toutes les guerres dans lesquelles il s’est lancé, de l’Indochine à l’Afghanistan, en passant par l’Algérie, le Vietnam ou Cuba. C’est sans doute parce qu’avec une stupéfiante mauvaise foi, à moins que ce ne soit par une sidérante ignorance, il sous-estime, voire méprise l’adversaire et qu’en tous les cas il se raconte à lui-même et plus encore à ses peuples les pires des balivernes.

Les hommes de Giap pendant la guerre d’Indochine puis celle du Vietnam, n’étaient qu’un ramassis de va-nu-pieds armés de bambous, en Algérie, les Fellaghas n’étaient que des bandes de bandits de grands chemins, en Afghanistan, les Talibans n’étaient que des hordes de sauvages, etc. et maintenant les 90.000 hommes du califat d’al Baghdadi ne sont que des égorgeurs (ce qui est vrai) et pas même musulmans.

Il est évident que les 6 à 7 millions de Musulmans de France ne sont pas (tous) des terroristes assoiffés du sang de leurs compatriotes Chrétiens et des Juifs et que la plupart d’entre eux désire, jusqu’à preuve du contraire, bénéficier de tous les avantages que leur offrent notre pays, notre société, notre civilisation. Mais il est tout aussi évident que les vrais pratiquants qui respectent les cinq obligations de l’Islam ne peuvent ni ne souhaitent s’assimiler à un système démocratique, laïc, attaché au progrès et à la parité hommes/femmes et, plus grave encore, ne peuvent qu’être sensibles à un réveil de l’Islam qui repart à la conquête du monde.

S’il ne faut sans doute pas faire d’amalgame par trop hâtif entre « nos braves musulmans » et l’armée de l’Etat Islamique d’Irak et du Levant, il est absurde de nier que ces égorgeurs sont des Musulmans qui mènent leur combat, pour l’instant victorieux, avec une kalachnikov d’une main et un Coran de l’autre.

Mais il est vrai que nos dirigeants de tous poils continuent, contre toute évidence, à nier que l’Islam renaissant à déclarer la guerre à l’Occident. Jouer sur les mots pour nier l’évidence, un vieux principe des empires décadents.