Il faut que Nicolas Sarkozy se méfie. A force de faire la dance de Saint Guy devant les Français en leur répétant qu’il ne sait toujours pas s’il sera, ou non, candidat à la présidentielle de 2017 et si, d’ici là, il reprendra, ou non, les rênes de l’UMP, il va finir par les exaspérer.
Tous les Français savent depuis plus de deux ans, depuis le soir même de sa défaite, que le petit Nicolas ne pense qu’à prendre sa revanche et qu’il fera tout pour apparaitre comme l’homme providentiel seul capable de battre François Hollande, déjà à terre, seul aussi capable de devancer très largement au second tour Marine Le Pen, ce que n’importe quel candidat serait capable de faire.
Les amis de l’ancien président nous disent que, pour mieux préparer son retour, Sarkozy souhaite envoyer aux Français des « cartes postales » afin de se rappeler à leur bon souvenir. En fait, ce sont des pavés dans la mare qui commencent à faire plouf.
Dans une longue interview à paraitre demain dans « Valeurs Actuelles », Sarkozy nous ment comme il ne l’a sans doute jamais fait, même au cours de son quinquennat.
« Je n’ai pas pris ma décision concernant la présidence de l’UMP parce que je veux avoir tous les éléments en main », nous dit-il froidement. C’est évidemment faux.
D’abord, parce qu’il a tous les éléments en main. Comme tout le monde, il sait que l’UMP est totalement « à la ramasse », financièrement et moralement après la guerre des chefaillons et les indélicatesses de Jean-François Copé. Il sait aussi qu’aucun des candidats actuels à cette présidence ne fait le poids pour retrouver des militants, des sympathisants et plus encore des financiers. Mais il sait aussi que, pour partir à l’assaut de l’Elysée, il faut avoir une « machine de guerre » puissante, organisée, présente dans tous les cantons de France et capable d’organiser des « grands messes » réunissant des dizaines de milliers de partisans un peu partout aux quatre coins du pays. Une telle machine de guerre ne se crée pas en deux ans. Il n’a donc pas le choix. Il faut qu’il reprenne la direction de la vieille boutique épuisée et qu’il en refasse ce qu’elle était.
A propos de la course à l’Elysée elle-même, il nous dit : « Comprenez bien qu’il ne s’agit pas de la décision de mon plaisir. Je n’ai aucune revanche à prendre sur quiconque ». Autre gros mensonge. Bien sûr que l’élection présidentielle n’est pas une partie de plaisir mais qui pourrait croire que Sarkozy n’a pas une revanche à prendre sur Hollande, sur le sort, sur les Français de droite qui l’ont abandonné et qui aujourd’hui s’en mordent les doigts.
Il ajoute : « La première campagne présidentielle, on la fait toujours par envie et par désir. Pour un retour, le moteur est le devoir ». C’est son nouveau « truc ». Depuis quelque temps, de carte postale en carte postale, il tente de nous faire croire qu’il n’a vraiment aucune envie et aucun désir de se relancer dans la bataille et qu’il préférerait de beaucoup couler des jours heureux et tranquilles en écoutant sa femme fredonner et en berçant sa petite fille. Ce ne serait que par « devoir » qu’il briguerait la présidence de la République, une abominable corvée que lui aurait assignée l’Histoire de France, comme elle l’avait déjà assignée à Jeanne d’Arc ou à De Gaulle. Le pauvre va donc aller vers les marches du pouvoir en trainant les pieds et en portant sa croix.
Qui pourrait le croire ? Pour qui nous prend-il, lui qui ne pense qu’à cela et pas seulement en se rasant tous les matins devant sa glace.
Cela dit, dans toute cette interview, il a tout de même deux phrases exactes. « Que l’on reparle de mon retour dans la vie politique est déjà miraculeux en soi ». C’est vrai. Quand on se souvient à quel point il fut détesté par les Français pendant les quatre dernières années de son quinquennat et qu’on évoque le bilan de ce quinquennat (le bling-bling, la nomination de Kouchner au Quai d’Orsay, les volte-face de gauche à droite, le discours de Grenoble, le Traité européen qu’il nous imposa alors que nous l’avions rejeté, l’opération libyenne, les déficits, le chômage, etc.) son retour est, en effet, ou miraculeux pour les uns ou cauchemardesque pour les autres.
Sarkozy est, évidemment, le seul Français à pouvoir remercier du fond du cœur François Hollande qui, en faisant encore pire, sur tous les plans, que son prédécesseur, l’a remis en selle.
Sarkozy a aussi raison quand il déclare : « L’idée du retour est inscrite dans les têtes, une grande partie du chemin est faite ». C’est exact ! Qu’on le veuille ou non, grâce à Hollande et à tous les socialistes, grâce à tous les dirigeants de l’UMP, grâce à la crise qui n’en finit pas, il a désormais toutes les chances de pouvoir prendre sa revanche et de retrouver son bureau à l’Elysée. Mais pour faire quoi ?
Quand Louis XVIII revint au pouvoir dans les chariots de la Restauration, certains s’écrièrent, affolés : « Il n’a rien oublié, rien appris ». Il est évident que Sarkozy n’a rien oublié mais a-t-il appris quelque chose pendant ces quelques années de traversée du désert ? Rien n’est moins sûr, hélas. Qu’il ait cru devoir poster cette nouvelle carte postale dans les colonnes de « Valeurs Actuelles » est déjà mauvais signe.

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