La malédiction de Matignon
Il y a deux types d’hommes politiques. Il y a ceux qui ont des idées et qui veulent entrainer le peuple derrière eux. Ils sont rarissimes. Et il y a ceux qui ont des mandats et veulent les conserver en tentant de suivre le peuple, en fait en trottinant derrière lui. Mais ces derniers qui sont, de loin, les plus nombreux ont parfois un problème. Ils ne savent pas toujours ce que souhaite réellement le peuple en question. C’est ici qu’on s’aperçoit que la démagogie est beaucoup plus difficile qu’on ne le croit généralement.
Prenez Hollande par exemple. Depuis la débâcle des municipales, il se demande si son électorat lui reproche d’être « trop à gauche » et de ne pas avoir eu les résultats promis, notamment en matière de chômage, ou si, au contraire, ses électeurs l’ont abandonné parce qu’ils l’accusent de mener une politique qui n’est « pas assez à gauche » et qui ne protège pas les plus modestes.
Le « peuple de gauche » lui reproche-t-il de ne pas avoir fait les réformes structurelles qui s’imposent pour relancer l’économie et créer de vrais emplois ou lui reproche-t-il d’avoir fait des « cadeaux aux patrons » en oubliant totalement les classes dites « laborieuses » ?
Quand Hollande se fait huer à Carmaux, sur les terres de Jaurès, c’est la gauche, dans ce qu’elle peut avoir de plus archaïque, qui lui rappelle bruyamment qu’elle ne l’avait pas élu pour faire de la social-démocratie et encore moins du social-libéralisme. Quand la grande majorité des députés socialistes acclame Valls présentant son programme de politique générale à l’Assemblée, c’est la gauche qui se veut moderniste et qui accuse, rétrospectivement, Hollande et Ayrault d’avoir perdu deux années sans oser rien faire.
On dira que la gauche ne sait plus ce qu’elle veut. Rêve-t-elle d’un redressement du pays qui suppose l’abandon de la fameuse exception française avec son Etat-providence ou s’accroche-t-elle désespérément et jusqu’à ce que mort s’en suive à cet Etat-providence en faillite depuis si longtemps ?
Hollande hésite. Le vieil apparatchik sait qu’il ne faut brusquer personne et que, pour durer, on doit ménager la chèvre et le chou. Moi-président, je le suis et je veux le rester, je ne vais donc pas bouger d’une oreille et je vais suivre le peuple dès que je saurai ce qu’il veut.
Valls, lui, n’a pas d’états d’âme. Il fait peut-être partie de cette minorité qui a des idées et qui veut les imposer. Il ne se pose pas de question sur le désarroi du peuple de gauche parce que, pour lui, en période de crise, avec un chômage épouvantable et un pays en complète déliquescence, il n’y a plus de peuple ni de gauche ni de droite mais seulement des braves gens qui n’en peuvent plus et qui sont prêts, pour que le pays sorte de ce marasme et eux avec lui, à n’importe quoi et notamment à jeter aux ordures toutes les idéologies, tous les phantasmes, toutes les fumisteries sur lesquels nous nous entredéchirons depuis un bon siècle.
Valls veut réussir c’est-à-dire devenir président de la République, quitte à tout casser. Mais il est tout de même obligé de faire attention.
Certes, le Premier ministre sait que, grâce à sa fabuleuse cote de popularité dans tous les sondages, il est aujourd’hui beaucoup plus fort que le président qui l’a nommé à contrecœur et qui ne pourra pas le virer avant longtemps, même après la nouvelle raclée que va prendre la gauche lors des élections européennes.
Il sait aussi qu’il est plus fort que les quelques députés socialistes qui font semblant de vouloir ruer dans les brancards car il lui suffira de murmurer le mot de « dissolution » pour qu’ils rentrent tous, bien sagement et bien vite, dans les rangs, le petit doigt sur la couture du pantalon.
Valls n’a rien à craindre ni de l’Elysée ni de l’Assemblée, mais il n’est pas à l’abri de… la rue. Il connait par cœur l’histoire de Matignon et sait parfaitement qu’un certain nombre de ses prédécesseurs ont été balayés simplement parce que quelques centaines de milliers de mécontents étaient descendues dans la rue, de Mauroy avec l’Ecole libre, à Villepin avec le CPE en passant par Chirac avec les manifestations contre la Loi Devaquet et par Juppé et sa réforme des statuts spéciaux.
Alors il arrive –déjà !- au Premier ministre de faire du… Hollande. C’est-à-dire de reculer prudemment. Il annonce qu’il va reculer pour les petites retraites, il a ordonné à Hamon de reculer sur les rythmes scolaires. Surtout ne pas avoir l’air d’être « droit dans ses bottes » et donc ne pas avoir l’air de faire de la provocation en refusant toute concession.
Mais reculer est un art délicat. On sait comment cela commence, on ne sait pas comment cela fini. Aujourd’hui, on recule sur les retraites les plus modestes ; demain, il n’y aura pas de raison pour ne pas reculer sur les fonctionnaires.
Valls a construit sa réputation en jouant les matadors prêts à terrasser au milieu de l’arène les taureaux les plus redoutables. S’il recule devant la première vachette venue, il est mort. Il le sait.
Valls ressemble de plus en plus au Sarkozy de 2007. Comme Sarkozy, il veut présenter le président en roi fainéant. Comme Sarkozy, il veut incarner non pas le changement mais bel et bien la rupture.
Mais Sarkozy était à Bercy ou place Beauvau. Pas à Matignon. Et Valls sait que jamais un Premier ministre n’a réussi à passer directement de la rue de Varenne à la rue du Faubourg Saint Honoré, ni Chirac en 1988, ni Balladur en 1995, ni Jospin en 2002. Il y a ce qu’on appelle « la malédiction de Matignon ». Valls ne pense qu’à ça…
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27 Avr 2014 7:39 1. Jean Louis
Vous me permettrez d’être autant perplexe que sceptique, tant sur les sondages mirobolants sur lesquels surfent ce petit ambitieux que sur ses chances de succès. Il est évident qu’il n’aura aucune prise sur les quelques grandes gueules qu’il a dans les jambes, style Royal, Montebourg ou belkacem, dont le collimateur est calé sur le journal de 20 H.
Si l’on reprend les fonctions régaliennes de l’État, il ne fera pas plus dans le couple Justice – Police que lors de son passage depuis deux ans. Il ne peut pas monter avec son copain Copé, un tohu bohu Dieudonné chaque semaine, et à part préparer le prochain dîner du Crif …
Dans le couple Diplomatie – Défense, il fera ce que Fabius, donc Washington lui dira de faire, situation que nous vivons depuis le premier jour de Sarkozy en Mai 2007.
Reste l’économie et le rythme de 1.000 chômeurs PAR JOUR qui ne faiblit pas malgré les acrobaties verbales imbéciles de son Sapin en bois dur. Dans ce domaine la catastrophe est annoncée avec le lâchage prudent de ses théoriciens les plus affirmatifs en 2012. Je pense en particulier à un professeur Elie Cohen, et ses acolytes Cette et Aghion, qui regardent totalement désabusés les annonces faites depuis dix jours, tellement brouillonnes qu’elles en sont illisibles. Là où ils attendaient de vraies réformes de structure, rien à l’horizon. Attentes naïves car il ne peut pas y avoir de réformes sur la dérive de la dépense publique avec les électeurs schizophrènes que traine Solférino, disons le peu qu’il en reste. Cohen est le même qui nous expliquait doctement en 2012, que défiscaliser les heures supplémentaires était une aberration dans un pays avec un tel taux de chômage, car cela poussait ceux qui avait un travail, à travailler plus, et bloquait la recherche d’emploi pour les autres. Air connu du partage du travail sur le mode de la fille Delors.Le résultat aujourd’hui est une explosion du travail non déclaré.
L’économiste éditorialiste des Échos J.M. Vittori faisait remarquer cette semaine qu’un bon 70% des députés socialistes n’ont jamais posé leurs fesses dans une entreprise, et pour au moins la moitié d’entre eux, l’entreprise est l’anti chambre de l’enfer. Que peut on attendre d’une vision aussi moderne du travail et des nouvelles formes de production ? D’un Christian Eckert par exemple, petit prof de maths monté en grade ?
Raymond Barre disait «la croissance ne se décrète pas». La confiance non plus !!
La crise de confiance me fait penser à cette réplique de Raimu – César à son fils «l’honneur, Marius, c’est comme les allumettes, ça ne sert qu’une fois …».
La confiance aussi. C’est du moins ce que l’on enseigne aux enfants.
Dans une telle ambiance Valls ne va pas convaincre les chefs d’entreprise, et la chute des rentrées fiscales continuera à se conjuguer avec la dérive des dépenses. Nous venons de recevoir nos feuilles d’impôts. Contents de savoir que le service de la dette (les intérêts essentiellement) est le premier poste de dépenses du budget de l’État. À vomir …
27 Avr 2014 17:44 2. MdePONTKALLEG
ON NE PEUT FAIRE CONFIANCE À MONSIEUR VALLS, le bel HIDALGO !
EN effet, c’est bien VALLS qui est encore complice d’avoir employé la BEL KACEM et la TAUBIRA dans le nouveau gouvernement . On ne peut lui accorder la moindre confiance ! Il est normal qu’il ait été hué, car les gens sont excédés ! excédés ! d’où une réaction de colère, une fois de plus !
et avec la BEL KACEM, ce n’est pas fini ! voyez ce qui s’annonce dans la suppression de la déclaration commune d’IRPP, au sein des foyers ! La « déconjugalisation » ! BEL KACEM est l’initiatrice de tout ce qui se passe de mauvais !
27 Avr 2014 20:31 3. Jean Louis
Valls, Royal et Montebourg convoqués chez pépère pour disserter sur le dossier Alstom, ça va fumer …
Que de grands spécialistes de l’industrie des turbines. Et de la gestion de groupes industriels internationaux.
Les financiers doivent être pliés de rire. La marge de l’Etat est nulle.
Les commentaires sur plusieurs sites sont éloquents.