Personne n’a pu être surpris par cette soirée du second tour des municipales. Comme prévu, les socialistes ont pris la déculottée qu’ils méritaient ; du coup, comme prévu et selon la fameuse règle des vases communicants, la droite a remporté, sans aucun mérite, un grand nombre de villes et notamment celles qu’elle avait perdues la dernière fois ; et, comme prévu, le Front National a gagné une dizaine de mairies. Enfin, comme prévu aussi, Gaudin a gardé Marseille et Nathalie Kosciusko-Morizet n’a pas gagné Paris.
Il est inutile de s’appesantir sur la défaite des uns et les victoires des autres. Cela fait des mois –en fait depuis le lendemain même du jour où ils les avaient élus- que les Français rejettent, avec une violence souvent inouïe, Hollande et ses amis qui se sont montrés, dès le premier jour, totalement incapables de tenir la moindre de leurs promesses et de faire face à la situation de plus en plus dramatique du pays. Sans rien faire d’autre que de se déchirer, la droite ne pouvait que bénéficier de ce rejet. Et il était évident que Marine Le Pen ne pouvait, elle, que ramasser les miettes de cette crise politique gravissime.
Ce scrutin, le premier depuis la présidentielle, ne fait que confirmer, en grandeur réelle, tous les sondages qui se sont accumulés ces vingt derniers mois.
Le chiffre le plus éloquent et le plus grave est ailleurs. C’est celui de l’abstentionnisme qui bat tous les records de la Vème République et qui prouve, à l’évidence, que les Français ne veulent plus entendre parler de cette faune politique, droite et gauche réunies, responsable, depuis des décennies, du déclin de la France. Ce sont ces abstentionnistes qu’il faudra bien qu’un jour la droite, le centre ou la gauche parviennent à récupérer. Faute de quoi la démocratie n’aura plus de sens dans ce pays.
Mais, à très court terme, la question qui se pose, dans l’urgence, est de savoir ce que François Hollande va bien pouvoir faire pour continuer à présider pendant les trois ans qui lui restent encore en vertu d’institutions qui n’avaient pas imaginé qu’un chef de l’Etat puisse être rejeté à ce point par les citoyens.
A voir la tête que faisait Jean-Marc Ayrault, ce soir, en reconnaissant la défaite, on peut croire qu’il savait son sort scellé. Selon son programme officiel révélé par l’Elysée, Hollande va maintenant recevoir Manuel Valls et Laurent Fabius. Est-ce pour nommer le premier à Matignon et le second à Bercy ? Peut-être.
A l’Elysée, on nous laisse entendre que le président veut retrouver « le peuple de gauche » qui lui a manqué. Mais le tout est de savoir si ce « peuple de gauche » existe encore. Depuis longtemps déjà, c’est le Front National qui est le premier parti des ouvriers, pour le peu qu’il en reste. Quant aux classes dites « moyennes », elles ont compris qu’elles étaient les premières victimes de la politique socialiste d’aujourd’hui. Ne subsistent, sans doute et encore, que les « bobos » des grandes villes ce qui explique évidemment le succès d’Anne Hidalgo.
En fait, nous avons maintenant un président « de gauche », élu parce que les Français ne voulaient plus d’un président de droite qui s’était trop droitisé, et qui, après des mois de sectarisme et d’échecs, a lui-même annoncé qu’il avait viré vers la social-démocratie et qui cherche aujourd’hui à retrouver un électorat… qui a disparu depuis belle lurette.
L’inexistence de Mélenchon et de ses candidats démontre jusqu’à l’absurde qu’un « coup de barre à gauche », comme certains le suggèrent au PS, serait voué à l’échec. Sans parler des conséquences catastrophiques qu’aurait immédiatement un tel virage.
Un « coup de barre à droite », comme la nomination de Valls pourrait le symboliser, provoquerait, bien sûr, l’éclatement de la majorité déjà chancelante, avec une insurrection des Ecolos et des amis de Martine Aubry qui s’imaginent encore que la lutte des classes pourrait réveiller les foules.
Hollande aime zigzaguer mais, sur son fil de funambule, au moindre pas à gauche ou à droite, il tombe. Mais il est vrai que son pouvoir, pour ne pas dire sa légitimité, ne tient même plus à un fil…

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