L’UMP va donc ouvrir « un débat » sur le quinquennat de Nicolas Sarkozy. Jean-François Copé hésitait car il savait très bien que ce déballage de linge sale (en public) risquait fort d’être dévastateur pour la droite. Mais, à la réflexion, il pense sans doute, que cet « inventaire » pourrait lui permettre d’éliminer ses deux rivaux pour 2017, à la fois Sarkozy et Fillon, puisque l’ancien président et l’ancien Premier ministre seront, de toute évidence, les deux accusés de ce « procès ». D’habitude, ce sont les nouveaux dirigeants qui dressent l’inventaire de leurs prédécesseurs. Hollande et ses petits amis ne se sont d’ailleurs pas privés d’accuser Sarkozy et la droite de tous les malheurs du pays. En se lançant dans l’autoflagellation, l’UMP innove et veut, sans doute, faire preuve de modernité. Les Français qui, aujourd’hui, se préoccupent davantage du bilan de la première année de François Hollande que de celui du quinquennat de Sarkozy qui fait maintenant partie de l’histoire ancienne, vont donc assister à ce spectacle étonnant d’un parti battant sa coulpe et réglant ses comptes. Ils auraient sûrement préféré voir l’UMP attaquer les socialistes et, mieux encore, présenter un programme cohérent d’alternance. Tout le monde connait le vrai bilan de Sarkozy : il a perdu les élections alors pourtant qu’il avait en face de lui un piètre candidat arrivé là par hasard et grâce à l’incroyable histoire du Sofitel de New-York. En démocratie, qu’on ait fait la meilleure et ou la pire des politiques, le verdict des urnes est le seul qui compte. Quand on est battu c’est, forcément, qu’on a été mauvais. Et tout le monde sait pourquoi Sarkozy a été battu, de peu il est vrai. C’est moins parce qu’il n’avait rien pu faire contre le chômage ou la dette que parce que les Français ne le supportaient plus, physiquement. Qu’il n’ait pas su relancer l’économie ou gérer sa réforme des retraites (en préférant s’attaquer au tabou de l’âge de la retraite à 60 ans plutôt qu’à la durée des cotisations), qu’il ait oscillé du centre vers la droite, voire l’extrême-droite (commençant avec Kouchner, finissant avec Buisson), qu’il nous ait ridiculisés en s’alignant servilement derrière les Etats-Unis et qu’il se soit lancé bien imprudemment dans sa guerre contre Kadhafi, n’a pas été déterminant. Ce que les Français, du moins 18 millions d’entre eux (soit 51,63%), n’ont pas pardonné à Sarkozy c’est son bling-bling, son manque d’allure, son agitation permanente, ses coups de sang, ses volte-face, son mépris pour la terre entière, à commencer par son Premier ministre. Cinq ans après, les Français lui ont fait payer la soirée du Fouquet’s. Les uns diront que c’est injuste et qu’après tout il n’était pas si mauvais que cela puisque ses successeurs reprennent, sans pudeur, un bon nombre de ses idées et présentent des résultats pires encore que les siens. Les autres rappelleront que les Français sont toujours nostalgiques de de Gaulle et qu’ils veulent un président qui soit si ce n’est un personnage historique du moins un homme d’Etat, avec un minimum d’envergure. Il faut dire que ces mêmes Français n’ont décidément pas de chance puisqu’au diablotin insupportable qui présentait si mal en s’agitant dans son bocal a succédé un mollasson détestable qui dégote encore plus mal en bredouillant ses contre-vérités. Et qu’après Cécilia et Carla on se retrouve avec « la Trierweiler ». A quoi pourra bien servir « l’inventaire » auquel vont procéder les ténors sans voix de l’UMP ? Ils seront tous d’accord pour reconnaitre, du bout des lèvres, que Sarkozy n’est pas allé assez loin dans ses réformes, qu’il a oublié la réforme de notre fiscalité, celle du code du travail, celle de notre mille-feuille administratif, l’abrogation des 35 heures, qu’il a sans doute privilégié les riches (et non pas les entrepreneurs), qu’il n’a rien fait pour l’Ecole, pour la justice (à part une réforme très contestable de la carte judiciaire), pour l’immigration, pour notre système de santé, etc. Mais ce « débat » va surtout permettre aux uns et aux autres de se « positionner » eux-mêmes. Les uns, les amis de Fillon, vont reprocher à Sarkozy de s’être beaucoup trop « droitisé » au fil de son quinquennat en courant derrière les voix récupérées par le Front national. Les autres, les amis de Copé, vont regretter que le même Sarkozy n’ait pas osé reprendre à son compte les grands thèmes de Marine Le Pen, l’immigration et la sécurité, qui lui avaient si bien réussi en 2007. Ces séances d’introspection collective vont sans guère de doute briser définitivement en deux, si ce n’est plus, ce qui reste de l’UMP. Mais elles vont surtout permettre aux socialistes de rigoler en voyant leur opposition se déchirer, basculer dans le nombrilisme et la repentance et, du coup, oublier que la fonction même des opposants c’est moins de se chercher entre eux des poux dans la tête que de tirer à boulets rouges contre ceux qui sont au pouvoir et qui accumulent les maladresses, les erreurs, les incohérences les plus absurdes. Mais cela fait longtemps que l’on sait que la droite française est la plus bête du monde. Ici, elle fait encore des progrès…

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