Va-t-il falloir reculer l’âge de la retraite et augmenter le nombre des années de cotisation nécessaires pour avoir une pension à taux plein ? C’est évident. L’allongement de la durée de vie l’exige. Mais François Hollande s’était engagé à ramener l’âge légal de la retraite à… 60 ans. Va-t-on aligner le système de retraites des fonctionnaires sur celui des salariés du privé. En clair, va-t-on calculer le montant de leurs pensions non plus sur leurs six mois de salaire mais sur leurs dix dernières années, voire même leurs vingt-cinq dernières années, comme ceux du privé ? Ce serait la moindre des choses. Mais les fonctionnaires sont la base même de l’électorat de François Hollande et sont, par définition, soutenus par les syndicats dont ils sont désormais les seuls « clients ». Personne n’a oublié les malheurs de Juppé quand, en 1995, il a tenté de s’attaquer aux « régimes spéciaux ». Le débat sur l’avenir des retraites qui commence à s’ouvrir risque fort d’être animé. Hollande se retrouve, une fois de plus mais plus que jamais, coincé entre le mur des réalités qui sont sans pitié et le souvenir encore vivace de ses promesses inconsidérées. Pas plus qu’il n’a pu relancer notre croissance, ranimer notre compétitivité, redresser notre productivité, sauver nos entreprises, faire baisser notre chômage, rétablir les comptes de l’Etat en réduisant nos déficits et notre dette, il ne pourra sauver nos retraites. A moins, bien sûr, de se parjurer totalement et de faire « pire encore » que ce qu’avait fait Sarkozy quand il avait reculé l’âge de départ à la retraite à 62 ans et déchainé les critiques de la gauche. Et ce n’est pas en créant des commissions, en organisant des concertations et des tables rondes ni en faisant semblant de rechercher un consensus avec les partenaires sociaux qu’il pourra ignorer la cruauté des chiffres. Notre système de répartition pouvait marcher quand il y avait trois actifs pour payer un retraité. Il ne pourra évidemment plus fonctionner quand il n’y aura plus qu’un actif pour un salarié. Ce n’est pas une question politique mais un simple calcul arithmétique. Les avantages donnés aux fonctionnaires étaient acceptables quand les salariés du public avaient des salaires inférieurs à ceux du privé et que la fonction publique n’attirait pas grand monde. Ils sont devenus intolérables pour les Français (non fonctionnaires) depuis que les salaires des fonctionnaires sont comparables à ceux du privé et surtout depuis que la garantie de l’emploi qui leur est assurée est devenue un avantage considérable dans un pays qui compte plus de cinq millions de chômeurs et qui a, de toute évidence, trop de fonctionnaires. Hollande n’a pas beaucoup de « munitions » pour aborder le débat. Il ressortira, sans doute, le dossier de la « pénibilité » qui permettra d’accorder une retraite un peu anticipée à ceux ayant eu une carrière particulièrement pénible physiquement. Ce serait d’ailleurs justice. Mais pour l’écrasante majorité des Français, il sera bien obligé d’allonger la durée de cotisation jusqu’à 44, voire 45 ans ce qui voudra dire un départ à la retraite à 65 ou 66 ans ou même plus. Rares seront les électeurs qui apprécieront. Pour tenter de calmer les fonctionnaires, il pourra faire intégrer les primes innombrables qu’ils touchent dans le calcul de leurs retraites. Mais cela ne les calmera pas pour autant. Bref, une fois de plus, Hollande n’a que quelques rustines dans sa boite à outils. Le tout est de savoir si Hollande aura, ou non, le courage d’affronter à la fois les réalités, sa majorité qui pense déjà aux prochaines élections, l’opinion publique qui lui est désormais plus que défavorable et les syndicats qui ne vont pas rater cette occasion pour rappeler à notre bon souvenir leur existence et leur pouvoir de nuisance, même s’il leur a toujours été plus difficile de paralyser le pays, à coup de grèves, sous un régime de gauche que quand la droite était au pouvoir. Et ne parlons pas de l’attitude que vont adopter Mélenchon et ses amis. Mais Hollande est-il courageux ? Ce n’est pas le trait de caractère qu’on lui accorde le plus souvent. L’affaire des retraites va être son véritable baptême du feu en tant que chef d’Etat car faire adopter les réformes qui s’imposent sera autrement plus difficile que d’envoyer nos soldats au Mali ou que de faire adopter par un parlement de godillots la loi sur le mariage des homosexuels. Oublier toutes ses promesses ne lui pose visiblement aucun problème. Mais là il va falloir que l’ancien apparatchik de la rue Solferino se lance résolument dans une grande politique dite « de droite » que la droite elle-même n’a pas osé mener jusqu’au bout.

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