Chavez, de Gaulle, Blum et… Lurel
Certains lecteurs de ce modeste blog ont été choqués parce que « l’hôte de ces lieux » n’a pas cru devoir verser de larmes de crocodile à l’occasion de la mort d’Hugo Chavez. Pire même, il a osé comparer ce grand copain des Castro, Kadhafi, Assad, Ahmadinejad et autres dictateurs nord-Coréens (autant dire tous les dingues de notre histoire contemporaine) à un petit « Mussolini tropical ».
Ils s’indignent que je n’aie pas été bouleversé par les centaines de milliers de Vénézuéliens qui ont tenu à lui rendre un dernier hommage et ils voient dans ces foules la preuve indéniable que Chavez n’était pas un dictateur et que son œuvre sera encore saluée pendant les décennies à venir.
Les hasards d’une carrière de journaliste m’ont fait assister aux obsèques de Boumédième, de Franco, de Tito, de Nasser (et de quelques autres). A Alger, à Madrid, à Belgrade, au Caire, les foules étaient infiniment plus nombreuses qu’elles ne l’ont été à Caracas et les cris de douleur des braves gens encore plus bruyants.
Mais ces démonstrations du désespoir populaire ne transformaient pas pour autant ces dictateurs en démocrates, même si la presse, toujours complaisante, se faisait alors un devoir d’affirmer que ces « grands hommes » qui entraient dans l’Histoire les pieds devant avaient rétabli un certain ordre dans leur pays, développer un peu l’économie et même redonner sa dignité à leur peuple.
Quelques mois plus tard, non seulement tous, sans exception, étaient oubliés par les foules mais leurs successeurs respectifs avaient, tous, pris systématiquement le contre-pied de la politique qu’ils avaient menée d’une main de fer pendant des années. Quant aux experts, spécialistes et commentateurs en tout genre qui avaient tressé à qui mieux-mieux des couronnes mortuaires aux disparus, ils commençaient à déchanter en nous avouant qu’à la réflexion le bilan du règne passé était plus catastrophique encore qu’ils ne l’avaient cru et dit.
La démagogie sans limite, le populisme effréné, le talent oratoire, la vulgarité et le goût de la provocation de Chavez pouvaient, en effet, le faire comparer au Duce même si, bien sûr, toute comparaison est toujours discutable.
Au passage il faut remarquer que tout dictateur ayant deux barils de pétrole devant lui, du Chah à Saddam Hussein en passant par Kadhafi, a fait baisser l’analphabétisme, construit des hôpitaux, des immeubles sociaux et favoriser le développement économique de son pays. Ce qui n’en a pas fait pour autant ni des démocrates pur jus ni même des bienfaiteurs de l’Humanité.
Nos amis mécontents ont donc dû être ravis d’entendre le représentant officiel de la République française aux obsèques de Chavez, un certain Victorin Lurel, comparer Chavez à de Gaulle et à Blum. La question qui se pose alors: Chavez était-il plus proche de de Gaulle ou de Mussolini ? Chacun répondra en son âme et conscience…
Certes, la gauche avait l’habitude de traiter le Général de dictateur mais c’est la première fois qu’un « orateur » de cette même gauche ose évoquer le père du Front populaire à propos d’un caudillo d’Amérique latine. On imagine qu’à la mort de Castro, l’envoyé spécial de François Hollande comparera le tyran cubain à Napoléon et à Clemenceau.
Il ne suffit pas de cracher sur les Etats-Unis, de vomir le capitalisme et de conspuer l’impérialisme pour être un démocrate. Cela serait un peu trop facile. Il faut garantir la liberté d’expression et donc de la presse et surtout éviter de se retrouver, à tous les coups, dans le camp des pires dictateurs. Quoi qu’en pensent Lurel et ceux qui partagent sa conception de la démocratie, Chavez n’était pas un partisan de la liberté de la presse et il lui arrivait de fréquenter des gens bien peu recommandables.
Cela dit, ces obsèques de Chavez auront permis non seulement aux uns et aux autres de donner leur propre définition de la démocratie mais aussi à Victorin Lurel, notre ministre des Outre-Mer, d’apparaitre, pour quelques heures, sous les feux de la rampe et, mieux encore, de démontrer le niveau de certains membres du gouvernement qu’on connaissait trop peu jusqu’à présent.
Dans le vaste Panthéon des imbéciles à la recherche d’un brin de notoriété, Lurel vient de rejoindre son collègue des Anciens Combattants, Kader Arif, qui avait annoncé à l’Assemblée Nationale la libération de nos otages du Cameroun qui sont, hélas, toujours retenus par leurs ravisseurs.
11 Mar 2013 20:38 1. Flyin'Dutch
Il est peut-être bien plus démocrate que certains autres chefs d’États, au Venezuela, il avait une opposition qui s’exprimait librement et qui ne s’en privait pas. Et je crois que son bilan importe bien plus ses provocations d’un goût certes très douteux mais qui montraient qu’il avait des « cojones », ce qui fait défaut à notre président d’après Martine Aubry. Sur la forme, c’était peut-être plus Mussolini, mais sur le fond, c’était du De Gaulle, le racisme en moins.
11 Mar 2013 21:00 2. dodo
je crois que notre hote fait une fixette sur la forme qui, chez chavez, était souvent des plus exubérante.
et après, au moins il n’était pas fadasse, meme si il en rajoutait dans le cinoche.
ce qui compte c’est le fond, et ça le père desjardin n’en parle pas.
facile d’aider les pauvres et de développer le pays avec une manne pétrolière ? oui et alors ? ça prouve quoi au juste ?
si c’est si facile, pourquoi ça n’avait pas été fait avant ?
quant à ses relations diplomatiques, normal qu’il ait soutenu les gens qui le soutenaient, il n’allait pas servir la soupe à l’otan tout de meme !
je crois donc que notre hote se trompe sur le compte de chavez, qu’il veut le peindre totalement en noir parce qu’il se disait socialiste.
peu importe les mots valises employés, seuls comptent les résultats, et là dessus le peuple avait dit plusieurs fois ce qu’il en pensait, ce qui est le fond de tout en démocratie, non ?
cordialement.
11 Mar 2013 21:07 3. jean
A sa place (de Lurel) je l’aurais comparé a Jésus (le Christ), même origines modestes, même talent d’orateur, même capacité a fédérer les foules, même « lubie » de vouloir partager les richesses, même ennemis (juste remplacer l’empire Romain par l’empire Américain).
Quitte a vouloir se faire connaitre en faisant dans la polémique, autant y aller franchement.
Au fait quel sont les arguments que vous avancez pour le définir comme un dictateur ou bien quel est votre définition de dictateur, ca m’intéresserait de savoir.
Je me permettrais de vous recommander un documentaire passé sous silence et sur Arte en 2004 qui dévoile les évènements qui se sont déroulés en Avril 2002 au Venezuela, lors du coup d’Etat organisé avec l’appui des médias (et de la CIA?) contre Hugo Chávez.
« Le révolution ne sera pas télévisé » si ma mémoire est bonne.
Important d’avoir plusieurs point de vues pour ce faire une opinion.
11 Mar 2013 21:08 4. jean
Voila, j’ai retrouvé:
http://jaiundoute.com/dossiers/01/2012/la-revolution-ne-sera-pas-televisee/
Bon doc’!
11 Mar 2013 21:18 5. ar!stide_lancien
Cher Monsieur Desjardins ce qui fait la valeur de votre blog c’est votre liberté d’esprit jointe à votre grande expérience professionnelle et je vous en remercie. Je partage votre point de vue sur Chavez, ce qui n’ ôte rien à son exceptionnel talent d’orateur populaire mais relativise bien son prétendu sens de la démocratie. Quand à le comparer à De Gaulle et à Léon Blum cela n’a aucun sens , pourquoi pas Jeanne d’Arc , Vercingétorix , Jean Jaurès,
Einstein ou … Tartempion ???
12 Mar 2013 9:56 6. ar!stide_lancien
Cela devait se produire: ce matin la presse nous apprend que le dirigeant Iranien Amadinedjad assimile H. CHAVEZ à Jésus Christ …
12 Mar 2013 14:22 7. bentolila
Moi Normal 1° je dmande solennement une journée de réflexion d’aide à mon ministra Hurel….
12 Mar 2013 18:36 8. infraniouzes
Victorin Lurel vous avez dit ? Plutôt V. LAUREL… Il doit bien y avoir un Hardy pas loin dans le barnum socialiste…
12 Mar 2013 19:12 9. Patrick-Louis Vincent
« Au passage il faut remarquer que tout dictateur ayant deux barils de pétrole devant lui, du Chah à Saddam Hussein en passant par Kadhafi, a fait baisser l’analphabétisme, construit des hôpitaux »
Je ne suis toujours pas d’accord avec vous sur ce sujet.
1 – Chavez n’était pas un dictateur ; il a été élu à 4 reprises à la régulière ; ses élections n’ont pas été contestées par l’opposition.
2 – Son prédécesseur, élu tout aussi démocratiquement, était aussi assez sur des barils d’or noir. Or, pendant ses mandats, la pauvreté et l’analphabétisme avaient augmenté.
Chavez a donc eu le mérite de faire ce que ses prédécesseurs n’ont pas sû faire.
Quant à ses soutiens à Khadafi et autres « dictateurs », je vous répondrais que ce n’est pas à Caracas que Khadafi a planté sa tente.
Nous autres, après avoir embrassé Moubarak, Saddam Hussein, Ben Ali et Khadafi, les avons ensuite trahi. Chavez, lui, n’a jamais retourné sa veste.
Enfin, il ne vous aura pas échappé que les alliés de Chavez étaient tous anti Américains et donc anti impérialistes (autrefois l’on aurait dit des non-alignés). En ce sens , il faut saluer son courage. Je rappellerais, enfin, que Chavez n’a fait la guerre à personne, contrairement aux occidentaux, et qu’il a utilisé les revenus du pétrole à des fins sociales, et non, comme les monarchies du Golfe, nos « amis », à soutenir le fascisme islamique.
12 Mar 2013 20:11 10. Diego
Il y a beaucoup à dire sur Chavez. Le négatif étant la corruption qu’on retrouve d’ailleurs à tous les niveaux en Amérique Latine, son clientélisme chose qui aussi est très pratiquée sur ce continent, son soutien aux FARCS, la guérilla narco colombienne, et sa mauvaise gestion automatique, l’insécurité, Caracas est devenue une des villes les plus criminogène d’Amérique du Sud. Il laisse un pays en situation économique piteuse, quoique détenteur des principales réserves prouvées de pétrole de la planète. Le positif étant sa lutte contre l’impérialisme américain très présent sur le continent, ingérences de la CIA, chargée de préserver les intérêts des multinationales US.Les programmes sociaux (alimentation, médecine, alphabétisation, formation professionnelle, logement…) consacrés aux quartiers les plus défavorisés, ont fait leur preuve. Un tiers des revenus du pétrole sont consacrés à ces programmes. « Pour aider les plus défavorisés, il a aussi mis en place des systèmes de micro-crédit pour permettre d’accéder plus facilement au crédit ». Je pense que Chavez était sincère dans sa démarche d’aider les plus pauvres mais il a laissé le pays être noyauté par les cubains.