Un fieffé menteur
Les Français savaient qu’il était insipide et sans saveur, ils ont appris, hier soir, qu’en plus Jean-Marc Ayrault était un fieffé menteur.
Pendant plus de deux heures d’horloge, tout au long de l’émission « Des paroles et des actes », et avec un culot stupéfiant, le Premier ministre nous assené une incroyable suite de contre-vérités.
Oui, nous a-t-il juré, les yeux dans les yeux, « une croissance de 0,8% est une hypothèse réaliste ». Tous les experts sérieux estiment que 0,3% serait déjà inespéré. Oui, a-t-il continué, le gouvernement « va ramener le déficit public à 3% en 2013 ». Ca ne tient pas debout et la France fait déjà partie des pays qui tentent de négocier à Bruxelles des délais pour arriver à ce retour à la normale. Et, comble du comble, il nous a affirmé : « 9 Français sur 10 ne seront pas touchés par les hausses d’impôts » alors que la refiscalisation des heures supplémentaires, pour ne citer qu’un seul exemple, va toucher 9 millions de salariés. Qui pourrait d’ailleurs croire qu’une augmentation de 10 milliards des prélèvements obligatoires sur les ménages ne concernerait que « les riches » ?
Ayrault a reconnu, du bout des lèvres, que François Hollande y avait été un peu fort en nous promettant qu’il inverserait la courbe du chômage « dans un an ». Moins affirmatif que son chef, le Premier ministre se contente de dire « On fera tout pour réussir. Il est important de se fixer des objectifs ambitieux ». Ce n’est donc plus une certitude mais un simple objectif. De même, Ayrault a reconnu qu’Hollande n’avait pas vraiment, comme il s’y était engagé, renégocié le traité budgétaire européen, imposé par Angela Merkel et signé par Sarkozy, mais qu’il avait tout de même… « fait bouger les lignes », ce qui ne veut strictement rien dire.
Le Premier ministre sait mieux que personne (du moins on veut l’espérer) que la croissance ne sera pas de 0,8%, que les 3% ne seront pas atteint l’année prochaine et que tous les Français vont être massacrés par les nouvelles mesures budgétaires. Pourquoi nous raconte-t-il des balivernes ?
Certes, il n’est pas le premier locataire de Matignon à prendre les Français pour des gogos et à tenter de rassurer les marchés en faisant preuve d’un optimisme délirant.
Mais les Français voient chaque jour leur situation et celle du pays se dégrader, leur niveau de vie dégringoler et les plans de licenciement se multiplier. Ils ont lu le programme du gouvernement et fait leurs comptes. Ils ont parfaitement compris que la fameuse tranche à 75% pour les plus fortunés n’était qu’un pitoyable gadget destiné à leur dorer la pilule terriblement amère. En même temps, ils ont entendu Vincent Peillon annoncer qu’il voulait recruter 60.000 nouveaux fonctionnaires (qu’il ne trouvera sans doute pas), ils ont vu les pitreries d’Arnaud Montebourg qui veut faire rendre gorge aux patrons, à commencer par Mittal. Tout cela leur semble incohérent et dérisoire. Quant aux marchés, Ayrault devrait savoir qu’on ne leur a jamais fait prendre des vessies pour des lanternes ni des propos d’estrade pour des garanties.
En mentant ainsi effrontément, Jean-Marc Ayrault s’est disqualifié. On était en droit d’attendre un langage de vérité et surtout une toute autre politique avec une vision claire et ambitieuse de l’avenir du pays.
Au lieu d’imaginer la place que pourrait avoir la France dans l’Europe de demain et au milieu de la mondialisation, au lieu de nous annoncer un vrai « changement » (qui s’impose) de toute notre vie économique et sociale, une révolution, en fait, pour nous éviter une mort programmée, Ayrault nous laisse simplement espérer que François Hollande sera candidat à sa propre réélection en 2017…
On nous avait présenté cette émission comme une session de « rattrapage » pour ce Premier ministre qui avait raté ses débuts. Il ne s’est même pas rattrapé aux branches.
Mots-clefs : Ayrault
28 Sep 2012 13:21 1. Flyin'Dutch
Je n’ai pas vu l’émission, d’ailleurs en tant que gauchiste déçu, j’évite au maximum de regarder cette troupe de clowns qui nous dirige, j’avais déjà assez de mal avec les précédents. D’ailleurs, « Des paroles et des actes » ne cesse de perdre de l’audience et on devrait parler de « dégringolade » plutôt que de « baisse ». Peut-être que de plus en plus de Français commencent à sortir de leur torpeur. On ne suit jamais assez nos dirigeants à l’étranger, c’est bien dommage parce que là, ils disent ce qu’ils pensent vraiment de nous : Raffarin avait dit au Canada que les Français allaient devoir réapprendre à se lever tôt, en 2003 Sarko était allé dire à George W.Bush que les Français étaient arrogants de ne pas avoir voulu aller en Irak… Plus récemment Hollande a dit à la City qu’il n’était pas dangereux alors que lors de sa campagne, il avait déclaré que son ennemi était la finance internationale. Avec toutes les délocalisations qu’il y a, on devrait penser à déménager nos dirigeants, au moins ils diraient ce qu’ils pensent. En plus, les décisions pour nous se prennent déjà à l’étranger, notamment à Bruxelles et à Wall Street.
28 Sep 2012 14:26 2. Jean Louis
Le ton de votre billet est absolument adapté à la situation, cher Thierry. Mais je corrigerai un peu : il n’est plus question de croissance du tout, mais de déflation ! C’est directement visible par chacun d’entre nous avec une activité économique en chute libre. Il n’est donc plus question de créer de richesses. Tout se conjugue dans le mauvais sens. Force est de constater que l’on peut renvoyer dos à dos le sarkocircus et Normal 1er. Un C dans l’air de la semaine dernière portait sur le gaspillage de l’argent public. Il fut longuement question de ce que vous avez appelé dans un de vos billets, le millefeuille administratif. Avec des exemples tellement choquants. Dosière a répertorié 1.200 agences d’état, et leurs 450.000 personnes avec un salaire moyen supérieur de 5% à la moyenne des salaires. 90 agents pour 1.000 habitants, contre 50 pour 1.000 en Allemagne, des vrais sous développés ces teutons (!), 9.500 agents dans la Bundesbank, et 13.000 à la Banque de France (normal, la France est riche !). Au classement de la compétitivité la France a décroché sous la 20ème place. Et la cerise sur le gâteau : le site Internet du Ministère de la culture a coûté 500.000 Eur quand des développeurs pouvaient le construire pour 50.000 ! Mais que faisait Frédo ? En WE prolongé en Thaïlande ?
Pitre parait le juste qualificatif pour notre grand spécialiste du tissu industriel. La révolte contre la refiscalisation est confirmée tous les jours dans ce que les économistes appellent les ETI (entreprises de taille intermédiaires). Fallait il une preuve que la totoche du Medef ne sert à rien ? Il ne va évidemment pas pomper 10 milliard sur les très hauts revenus uniquement, lesquels s’en vont d’ailleurs, et ils ont raison.
Ce que l’on voit mal est que l’on a à faire à de vrais salauds, cyniques. En PACA, bronca de jeunes socialistes qui s’élèvent contre les méthodes staliniennes, en fait à la Aubry, qui bloquent toute discussion, et font la courte échelle au clan Guérini, dont les instructions en cours ont avéré les liens avec le grand banditisme.
28 Sep 2012 16:44 3. ar!stide_lancien
Très bonne critique, bravo, à diffuser largement.
Nous en sommes là où en était la Pologne avant la chute de Jaruzleski.
!l nous faut une SOLIDARNOSC à la française contre ces idéologues menteurs et totalitaires
30 Sep 2012 22:28 4. Franzi
@ Jean-Louis
Il faut comparer ce qui est comparable.
Concernant la Banque de France :
1. Elle ne coûte rien à l’Etat. Au contraire, elle est le plus gros contributeur aux Finances Publiques.
2. Elle a de nombreuses activités à très forte valeur ajoutée. Activités inexistantes à la Bundesbank. Quelques exemples : observatoire économique à très fine résolution effectuant études destinées au Gouvernement de la France (stratégie en politique économique et financière de la France ; NB : elle donne les infos mais ne participe pas aux décisions ;)…) ; médiation du crédit pour les entreprises en difficulté + partenariat à l’attribution des aides de l’Etat ; secrétariat du Surendettement pour les particuliers; etc.
3. Rassurez-vous l’effectif va diminuer : pyramide des âges très élevée et déséquilibrée => pas ou peu de remplacement des départs en retraite.
Et surtout, remise en cause du maillage sur le territoire.
Bientôt, beaucoup moins d’analyses économiques (pour ce que ces charlots en font !…)
Bientôt, beaucoup plus d’attaques de convoyeurs de fonds (= bien plus de morts + espèces moins disponibles) : diminution des caisses = allongement des trajets et augmentation des sommes transportées.
Vous pouvez commencer à vous réjouir ! 🙁