La tragédie grecque et l’effet dominos
Tout le monde en a assez de la crise grecque. A commencer par le Premier ministre grec, Papandréou qui, pris entre le marteau des financiers européens qui matraquent son pays et l’enclume du peuple grec au bord de l’insurrection générale, a décidé de capituler. Il va demander par référendum à sa population si elle est d’accord pour crever de faim davantage encore et pour céder l’indépendance nationale à des experts venus de Bruxelles.
Un premier sondage révèle que… 12% des Grecs sont favorables à l’accord obtenu au forceps par les chefs d’Etat de la zone euro et qui efface 50% de la dette grecque en échange de nouvelles mesures d’austérité imposées aux Grecs. Autant dire que Papandréou ne se fait aucune illusion sur les résultats du référendum qu’il propose.
Il sait que son pays, complètement en faillite, ne peut que se soumettre aux exigences de ses créanciers mais il sait tout aussi bien que sa population ne peut pas accepter ces nouvelles exigences. Au bout du rouleau, il se résout donc à ce suicide politique, un référendum perdu d’avance suivi de législatives perdues d’avance elles aussi. Et l’idée de voir son opposition, les conservateurs, lui succéder et hériter de cette situation catastrophique doit sans doute le faire sourire.
Mais alors que va-t-il se passer quand nous nous retrouverons avec un nouveau gouvernement grec obligé de refuser le plan de sauvetage que lui propose « généreusement » l’Europe affolée ? Personne n’en sait rien. Les Bourses ont déjà compris qu’on allait droit à la catastrophe. Après avoir connu quelques jours d’« euphorie » au lendemain de l’accord de Bruxelles, elles ont de nouveau replongé dès ce matin, comprenant que les tours de passe-passe et les communiqués de victoire de nos grands dirigeants n’étaient que du vent en face des réalités et de la volonté populaire.
La Grèce nous prouve aujourd’hui que ceux qu’on appelle désormais « les indignés » -en clair « la piétaille », les « sans grade », les « crève-la-faim », le peuple- sont plus forts que les chefs d’Etat, les élites, les experts et même les financiers. Les uns et les autres sont sûrs d’eux-mêmes. Les uns parlent chiffres, budgets, recettes, dépenses, déficits, dettes, intérêts. Les autres parlent misère, chômage, précarité, désespoir. C’est forcément un dialogue de sourds. Et si les uns peuvent prendre des décisions, signer des compromis, exiger de nouvelles mesures, les autres peuvent descendre dans la rue et c’est ce qu’ils font.
L’Europe, elle-même ruinée, ne peut pas s’endetter plus encore pour prêter indéfiniment des milliards à la Grèce en faillite, incapable de gérer son budget et de lever des impôts. Mais le peuple grec qui n’est pas pour grand chose dans cette situation ne peut pas supporter le régime d’austérité sans pitié qu’on veut lui imposer.
On (Sarkozy) nous dit maintenant qu’il était absurde de faire entrer, en 1981, la Grèce dans « l’Europe des riches » (aux économies déjà chancelantes). C’est sûrement vrai. Ajoutons d’ailleurs que, depuis 1981, dans cette fuite en avant déraisonnée des eurolâtres, nous avons fait entrer dans cette même Europe 17 autres pays dont certains bras cassés comme l’Espagne, le Portugal, les pays Baltes, Chypre, Malte ou, pires encore, la Bulgarie ou la Roumanie.
Va-t-il falloir, maintenant qu’ils nous ont entrainés dans leur dégringolade, virer les cancres et les faire passer par-dessus bord de notre rafiot à la dérive ? De plus en plus nombreux sont ceux qui osent désormais évoquer cette hypothèse jusqu’à présent tabou. Mais, après nous avoir bassinés avec la « solidarité européenne », on nous brandit maintenant tous les risques de l’effet dominos. Les liens qui nous unissaient pour aller tous ensemble vers un monde meilleur, sont des chaînes qui nous entraînent vers les bas-fonds.
Une chose est sûre : le coup d’éclat de Papandréou tombe particulièrement mal pour Sarkozy qui voulait démontrer aux maîtres du monde qu’il accueille à Cannes que l’Europe savait prendre des décisions courageuses et qu’on pouvait donc l’aider à sortir de cette passe un peu délicate. Le Chinois va sans doute lui demander de lui expliquer plus en détail ce fameux plan de sauvetage de la Grèce, de l’euro, de l’Europe auquel on lui demande de participer.
01 Nov 2011 12:36 1. sandrine
Finalement, ce ne sera peut etre pas une si mauvaise chose si cela fait exploser l’euro.
De toute façon, la fin de tout cela ne peut etre que la fin de l’euro. Je ne vois pas comment il peut en etre autrement. Cette monnaie c’est du n’importe quoi. Des technocrates qui pondent des lois et des traités sans se demander les conséquences qu’elles pourraient avoir.
A se demander si ces gens qui nous gouvernent ont une cervelle. J’ai bien l’impression que le quidam moyen est plus intelligent que ceux ci…
01 Nov 2011 13:34 2. Marie
Ce qui s’est réellement passé le 28/10, pour la fête nationale !
La tradition du cortège, lors d’une parade, est de regarder la tribune où sont présents les officiels et élus. Pour la première fois, en cette année 2011, les personnes présentes dans les cortèges ont, pendant la marche, détourné leurs têtes pour regarder la population plutot que les élus. Pour la première fois, des personnes des fanfares ont porté un brassard noir, signe de deuil familial. Un signe de deuil national ?
http://www.lepost.fr/article/2011/10/30/2625899_le-jour-du-non-927-967-953-poste-sur-le-blog-www-les-crises-fr.html
01 Nov 2011 14:09 3. drazig
Les dettes sont trop lourdes. C’est fini, c’est la faillite. Ils (Sarko) en sont à nous raconter des craques: voir le blog « Démystifier la finance ».
01 Nov 2011 14:29 4. Patrick-Louis Vincent
Je suis d’accord avec Sandrine ; la décision de Papandréou va clarifier la situation. Au moins, lui, demande à son peuple de le suivre ou de le démettre. C’est une attitude courageuse et noblement politique. Je m’interroge seulement sur les délais pour mettre en place un référendum. La politique va plus vite que l’économique et beaucoup moins vite que le financier. A la bourse de Paris, sauf redressement, nous assistons à un mardi noir. Les banques françaises reperdent en 2 jours ce qu’elles avaient gagné en 1 mois. La Société Générale, à 14h00, heure où j’écris ces lignes, perd 17% de sa valeur.
L’effet d’annonce du couple Sarkozy/Merkel n’aura tenu que 48h.
Oui, l’euro est une monstruosité technocratique, une sorte d’hydre à 17 têtes. L’un des 12 travaux d’Hercule fut de le tuer. Qui tuera la bête ? Peut-être le peuple Grec. Nous sommes de son côté.
Comment l’évidence peut-elle encore échapper aux dirigeants européens. Je lisais ce matin que la différence entre le Franc et le Mark était aujourd’hui de 52% (c’était 30% il y a 6 mois). Cela signifie que, pour être compétitif, la France devrait pouvoir dévaluer sa monnaie de 50% par rapport au mark. Pour les autres pays du sud, l’écart est encore beaucoup plus important.
Nous ne le dirons jamais assez ; le problème n’est pas la dette en soi, c’est l’écart de compétitivité entre les états composant la zone euro. La baisse de compétitivité ne permet plus la croissance et, l’absence de croissance ne permet plus de rembourser la dette.
L’euro est une moyenne entre différentes monnaies nationales qui n’ont pas disparu, contrairement à ce que beaucoup croient. L’euro est trop faible pour l’Allemagne et beaucoup trop fort pour les pays du sud, dont la France. L’écart de compétitivité ne cesse de se creuser entre les différents pays eurozonards, et cet écart devient exponentiel. Cela devient invivable pour la zone sud, et le sera bientôt aussi pour l’Allemagne.
Sortir de l’euro, dévaluer fortement les monnaies nationales, suspendre le paiement des intérêts bancaires et réétaler la dette dans le temps sont les seules solutions pour que les pays du sud retrouvent leur compétitivité. L’Argentine, la Suède et la Russie l’ont fait et ont retrouvé le chemin de la croissance. Dire que nous ne pouvons pas le faire est un mensonge d’état.
L’€URSS doit s’écrouler. Elle va s’écrouler.
01 Nov 2011 14:43 5. Patrick-Louis Vincent
@drazig
Georges Ugeux, sur le blog « démystifier la finance », parle en financier et pas en économiste. Il le dit lui-même « Le scenario de défaut de paiement aurait des conséquences catastrophiques sur la stabilité financière européenne et, par ricochet, mondiale ». C’est vrai et ses clients perdront beaucoup d’argent. Mais, ce qu’il ne dit pas, c’est que si le gouvernement grec continue d’affamer sa population, c’est la guerre civile qui prévaudra.
Il résume donc assez bien la situation. Faut-il sauver les banques et les investisseurs ou faut-il sauver les peuples ?
Quand l’Argentine a fait défaut, les investisseurs, financiers et spéculateurs ont perdu beaucoup d’argent. Certains se sont refait depuis, d’autres pas. Mais 8 ans plus tard, l’Argentine affiche des taux de croissance de 6 à 8%. C’est cela qui compte. Le peuple ne s’y est pas trompé en réélisant très largement leur présidente.
01 Nov 2011 16:17 6. Patrick-Louis Vincent
Le communiqué de la Commission Européenne :
« Nous prenons note de l’intention des autorités grecques de tenir un référendum. »
Vous avez bien lu, la Commission parle d’intention et non de décision.
Autrement dit, vous avez l’intention de faire un référendum, mais l’on vous tout pour vous en empêcher.
01 Nov 2011 17:07 7. sandrine
@ PLV
De toute façon, Sarko n’est pas un modèle de démocratie, voir comment il a traité le NON à la constitution.
Lui et Merkel sont en train de faire pression sur Papandréou pour qu’il respecte l’accord de Bruxelles en renonçant au référendum. Si leur accord est si bien pour les grecs, pourquoi ont ils si peur qu’ils disent NON ?
Tout ça montre que ça sent le sapin pour l’Europe. Si ce n’est pas maintenant, c’est pour le prochain domino, dans un an maximum.
01 Nov 2011 17:43 8. imprécator
« Mais le peuple grec qui n’est pas pour grand chose dans cette situation… ». Voire… N’oublions pas que la fraude fiscale est en Grèce une sorte de sport national, voire l’un des beaux arts
01 Nov 2011 18:18 9. jean
Un référendum en février quand le pays n’a pas de fond pour tenir 2 mois??? C’est le renvoyer aux calendes grecques… =)
01 Nov 2011 19:53 10. drazig
@PLV
Oui, mais il faut passer impérativement par la monnaie. Je note d’ailleurs que de mon temps la Monnaie faisait partie des études de Droit, car elle touchait directement à la souveraineté de l’Etat. Philosophiquement, la monnaie est moyen absolu, comme le langage ou la santé. Le langage est le moyen d’exprimer la pensée mais il ne peut y avoir pensée sans langage. La monnaie a le même rapport dans l’économie.
01 Nov 2011 20:12 11. Marianne
D’accord avec imprécator: les Grecs sont quand même en partie responsables de ce qu’il leur arrive. Non seulement la fraude fiscale mais la corruption à tous les niveaux.
Ceci dit, j’estime que chaque pays, chaque nation a le droit de vivre comme il l’entend. Ce qui veut dire que si les Grecs veulent plus d’heures de sieste que de boulot, c’est leur affaire. On ne peut pas demander aux Grecs de vivre comme des Allemands.
Ce qui veut dire que ce fut une grave erreur de l’accepter dans l’UE, comme ce fut une grand eerreur pour elle d’avoir accepté d’y entrer.Mais c’était tellement alléchant! On allait pouvoir continuer à faire la sieste , puisque Bruxelles financerait…
Mais rappelez-vous, à l’heure de Maastricht:la construction de l’UE , son élargissement ne devaient pas être discutées.C’était une grande avancée. Point barre.Souvenez-vous de quelle façon étaient traités les eurosceptiques !Souvenez-vous quels qualificatifs étaient attribués aux Cassandre qui mettaient en garde contre les difficultés pour certains peuples à suivre le rythme des plus forts,et prévoyaient que certains peuples s’essouffleraient à devoir suivre et que cela provoquerait des tensions entre les peuples disparates…
« L’Europe c’est la paix et la prospérité » nous annonçaient nos maîtres à penser.
Il eut fallu en rester au Traité de Rome, avec des Etats relativement au même niveau économique .
Je voudrais rappeler ce que déclarait Julien Dray lors de la campagne en faveur du traité de Maastricht:
« Ceux qui sont attachés à la défense des acquis sociaux devraient savoir que la seule possibilité aujourd’hui réside dans la cosntruction européenne. Pour aller de l’avant dans les conquêtes sociales , il n’est d’autre avenir que la construction de l’Europe »
Les Grecs, comme les autres d’ailleurs y ont cru!
Malheureusement, on vient nous dire que ces difficultés de l’euro viennent du fait qu’il n’y a pas assez « d’Europe », qu’il nous faut maintenant plus d’Europe, c-à-d une Europe fédérale, avec un gouvernement central, supranational..
Une Europe fédérale dans laquelle la France ne serait plus que la Louisiane de l’UE..
01 Nov 2011 22:16 12. Alain Bellemere
Le flou est la pire des choses, Papandréou est entrain d’empapaouter le couple Franco-Allemand qui tombe de l’armoire avec l’annonce de son référendum. Avoir passer 4 jours et une nuit blanche pour faire un volte face spectaculaire a de quoi déconcerté les Euro-satisfaits. Sarkozy le chef d’orchestre des 17 a donné le ton, pas question de changer la musique réglée au petit matin pour un empêcheur de tourner en rond, en un suicidaire irresponsable. Merkel et Sarkozy satisfaits de la feuille de route imposée à Papandréou n’avaient pas réalisé que le pouvoir de la danseuse Grecque était mimétique et évoluait vers la pantomime. Hé oui! Papandréou s’est avancé masqué durant toutes ces palabres au sommet de Bruxelles, et une fois à la maison, il s’est débarrassé de sa ceinture trop petite et ses angoisses sont réapparues en jetant un regard éperdu dans la rue, le peuple de manifestants n’avaient pas bougé depuis des semaines. L’effet de contagion est à craindre pour les pays dégradés de leur triple A, la France serait emporté dans l’explosion, et Sarkozy mise aussi sur sa réélection en 2012 avant qu’il ne soit trop tard,si malheur devait arriver, on pourra toujours aller se faire voir chez les Grecs avec notre économie ultra-libérale.