Dominique Strauss-Kahn sera la vedette du journal de 20 heures, demain, sur TF1. Il y a 48 heures, les six candidats à la primaire de la gauche ont attiré près de 5 millions de téléspectateurs. On peut parier que DSK fera beaucoup mieux. Nous sommes un peuple de voyeurs et les « histoires de cul », surtout si elles sont un peu glauques, nous ont toujours beaucoup plus intéressés que l’avenir du pays.
Certains s’étonneront peut-être que la première chaîne de télévision française ouvre tout grand son plateau à un homme qui, depuis quelques mois, a déserté les pages politiques pour envahir celles des faits divers. C’est, en tous les cas, la première fois que la télévision offre sa plus belle tribune à un homme accusé de tentatives (avec un s) de viol.
On dira que le procureur de New-York a finalement renoncé à le poursuivre, l’accusatrice ayant menti à maintes reprises, dans le passé et même, semble-t-il, dans le récit de l’agression dont elle se dit avoir été victime. Il n’empêche que les traces d’ADN sont formelles et qu’il est difficile d’imaginer que cette femme de ménage guinéenne soit tombée, en quelques minutes, éperdument amoureuse du directeur général du FMI, quels que soient ses charmes. On peut, au mieux, imaginer que la jeune femme dont la moralité ne paraît pas irréprochable ait tendu un piège à DSK pour tenter de le faire chanter, piège dans lequel le bonhomme –après avoir déjà passé la nuit avec une prostituée- aurait sauté à pieds joints. Dans ce cas, DSK ne serait pas un délinquant sexuel mais un obsédé sexuel totalement inconscient. D’ailleurs si l’affaire est close au pénal, elle va reprendre, cette fois, au civil dans quelques mois.
Là-dessus se greffe l’affaire Danon. Les amis de Strauss-Kahn ne voulaient pas croire qu’après avoir « sauté » la mère « le satyre du PS » ait voulu en faire autant avec la fille. D’après l’Express, il vient de reconnaître devant les policiers qu’il avait juste tenté de l’embrasser. Tenter de « voler un baiser » n’est pas un crime. Mais il est évident qu’un homme accusé de tentative de viol et qui avoue qu’il s’est « un peu » jeté sur la jeune femme qui l’accuse commence à filer un bien mauvais coton.
Que Strauss-Kahn, au lieu de se faire oublier pendant quelque temps comme on aurait pu le lui conseiller, refasse déjà surface pour présenter sa défense, nous raconter sa version des faits, expliquer sa conduite et, peut-être, nous présenter des excuses pour l’image déplorable qu’il a donnée pendant des semaines de la France est un choix inattendu et presque courageux, même si bien des téléspectateurs vont, sans doute, s’écrier demain soir : « Décidemment, ces gens-là ont tous les culots ».
On veut croire que l’ancien grandissime favori à la course à l’Elysée ne va pas nous faire le coup du complot. A moins qu’il n’ait des preuves irréfutables démontrant que Mme Diallo travaillait pour les services secrets de Sarkozy et Mlle Danon pour ses ennemis au sein du PS.
Le plus élégant serait évidemment qu’il nous annonce qu’étant un grand malade et, semble-t-il, incurable, il renonce à tout jamais à la vie politique et même publique.
Il est davantage vraisemblable qu’après avoir vaguement bafouillé des alibis et des excuses, il se dise toujours prêt, et plus que jamais, à mettre ses (évidentes) compétences économiques que personne ne conteste à la disposition du pays.
Quoi qu’il en soit, à part Sarkozy et ses amis qui boivent du petit lait, tout le monde ne peut que regretter –et surtout après avoir vu les six candidats de la primaire- que celui qu’on considérait comme l’un de nos plus brillants hommes politiques se soit ainsi suicidé. Certes, il avait été socialiste mais son séjour à la tête du FMI avait amplement démontré qu’il ne l’était plus et qu’il avait compris l’irréalisme délirant des utopies de ses petits camarades de la rue Solferino. DSK n’était plus socialiste mais il était toujours obsédé.
Cela dit , même s’il paraît stupéfiant que Claire Chazal s’offre ainsi à lui demain soir, nous allons tous regarder comment il va essayer de se dépêtrer de ces histoires. On sait qu’il a du talent et, faute d’avoir du pain, il nous faut bien maintenant nous contenter de ces jeux. C’est le sort des empires décadents. On s’amuse d’un rien.

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