Pompidou a dû se retourner dans sa tombe
On ne sait pas si les morts se retournent vraiment dans leur tombe, mais, si c’est le cas, Georges Pompidou a dû se retourner dans la sienne aujourd’hui.
A l’occasion du centième anniversaire de la naissance du successeur de de Gaulle, Nicolas Sarkozy est venu lui rendre hommage dans son village natal de Monboudif au fin fond du Cantal. Certains diront qu’il est normal qu’un président de la République célèbre le centenaire d’un de ses prédécesseurs. D’autres qu’en période préélectorale tout est bon à prendre, surtout dans un département particulièrement abandonné. Mais ceux qui ont connu cette époque et qui ont eu la chance d’approcher un peu Georges Pompidou resteront tout de même un peu pantois.
Que de chemin parcouru depuis ce septennat interrompu par la mort en 1974. Quelle dégringolade ! C’était encore les fameuses Trente glorieuses, et même s’il y avait eu Mai 68, nous ne connaissions pas le chômage, nous n’avions aucun problème d’immigration ou de délinquance et, en quelques années, de Gaulle et Pompidou avaient su transformer un pays agricole en pays industriel, nos usines tournaient à plein régime, le pouvoir d’achat de tous les Français augmentait d’année en année. Bref, c’était le bon temps !
Mais ce qui était le plus étrange aujourd’hui dans ce curieux face-à-face, à travers les décennies, entre les deux hommes c’était, bien sûr, leur personnalité.
Deux présidents de cette même Vème République. Un normalien citant Eluard dans ses conférences de presse et auteur d’une anthologie de la poésie française et un apparatchik méprisant la Princesse de Clèves et préférant les stars du show-business aux grands auteurs. Un homme qui sut, par dignité, cacher les douleurs atroces de sa maladie et un autre qui ne nous épargna pas un seul détail de ses malheurs matrimoniaux et de ses bonnes fortunes amoureuses.
Mais surtout un grand président qui répétait souvent « Il faut être très présomptueux pour s’imaginer qu’on peut écrire sur les pages blanches de l’histoire » ou « J’ai la faiblesse de croire que le problème de la répartition serait grandement facilité si nous avions davantage à répartir » et un éternel candidat en campagne qui après avoir annoncé « la rupture » et promis qu’« en travaillant plus on gagnerait plus » proclame qu’il ira « chercher la croissance avec les dents » et qu’il va instaurer « une gouvernance économique mondiale ».
Georges Pompidou traverse actuellement sa période de purgatoire dans notre histoire. Il sera un jour réhabilité et on lui saura gré alors d’avoir su poursuivre, tant bien que mal, l’œuvre du Général.
Mais Sarkozy a eu grand tort aujourd’hui de vouloir se targuer de l’héritage de Pompidou. Il a, une nouvelle fois, eu l’air d’un usurpateur. Et surtout il a rappelé aux Français l’image d’un président qui n’avait pas fait de la chasse aux délinquants, aux immigrés, aux Roms, aux étrangers son fonds de commerce et qui préférait préparer l’avenir plutôt que de jouer sur les peurs.
On met souvent en avant les chiffres du PIB ou de la croissance pour comparer les époques. Mais il suffit parfois d’évoquer l’image de ceux qui ont siégé ou qui siègent à l’Elysée pour tout comprendre.
Cela dit, les peuples n’ont jamais que les responsables qu’ils méritent ou en tous les cas qu’ils ont choisis.
05 Juil 2011 15:33 1. cp
La citation d’Eluard à propos d’un fait-divers tragique d’alors mérite d’être remise en contexte, celui d’un numéro de compères avec le très gouvernemental Jean-Michel Royer (De RMC, alors radio d’état), qui posait pile la question qu’il fallait pour permettre à Pompidou de jouer les grandes âmes miséricordieuses, et de conclure une morne conférence de presse par un éclat, la com déjà en ces temps là avait ses exigences !
C’est Giscard qui a rompu avec des conférences de presse d’autant plus brillantes, de la part des présidents, que ces derniers connaissaient les questions d’avance ! Et, comme De Gaulle, ne répondaient pas aux malotrus hors pistes…
05 Juil 2011 15:56 2. drazig
Oui, le Président Pompidou était un grand Président, ne serait-ce que par ce qu’il disait à Chaban-Delmas: « Le premier devoir d’un politique est de faire la politique de ses électeurs ».
05 Juil 2011 20:15 3. Marianne
M. Desjardin,
Vous écrivez :
« Et surtout il a rappelé aux Français l’image d’un président qui n’avait pas fait de la chasse aux délinquants, aux immigrés, aux Roms, aux étrangers son fonds de commerce et qui préférait préparer l’avenir plutôt que de jouer sur les peurs. »
Evidemment, c’était plus facile pour lui, Pompidou; à son époque ces problemes n’existaient pas, comme vous l’écrivez plus haut:
« C’était encore les fameuses Trente glorieuses, et même s’il y avait eu Mai 68, nous ne connaissions pas le chômage, nous n’avions aucun problème d’immigration ou de délinquance »
Je ne soutiens pas Sarkozy, mais qu’aurait fait Pompidou avec les problèmes d’immigration que nous avons aujourd’hui et la mondialisation que l’on nous impose ? Peut-être aurait-il mieux réagit que notre président actuel contre cette immigration massive, peut-être aurait-il mis les moyens pour la réguler ,`peut-être aussi aurait-il employé le Kärcher, lui, pour régler les problèmes de délinquance.
Mais il faut dire aussi à décharge de N. Sarkozy, que la bienpensance, le politiquement correct ne s’étaient bas encore imposés comme aujourd’hui et les procès d’intention des adversaires n’avaient pas attent l’empleur qu’ils ont aujourd’hui; ils ne tétanisaient pas encore nos chefs d’Etat…
05 Juil 2011 21:10 4. Alain Bellemere
Malgré l’époque, Pompidou renvoyait une image nouvelle avec son air bonhomme et sa cigarette collée aux coins des lèvres. Il avait apporté un souffle puissant dû à sa grande culture et savait être simple. Le couple présidentiel avait bouleversé les aménagements de l’Elysée pour se créer l’ univers d’un intérieur moderne. Bien sûr aucune comparaison avec Sarkozy qui nage dans l’argent, gesticulant et grimaçant de jour en jour tel un mauvais comédien. Qui se souvient des conférences de presse, où Pompidou du haut un large bureau pouvait d’un regard direct fusiller un intervenant si ses questions ne valaient la nécessité d’une réponse, même son autoritarisme était craint pour son entourage. Je ne pense pas qu’il se retournerait dans sa tombe en voyant les nouveaux scénarios inventés par Sarkozy, depuis ce temps l’eau a coulé sous les ponts en charriant les pierres du passé.
06 Juil 2011 11:00 5. Jean
N’y avait-il pas d’immigration massive dans les années 60-70? Pas de délinquance, de mafia, de problème avec les gangs, de braquage etc… Me souvient plus.