La dernière mode de nos « beaux esprits» est d’ironiser sur les ambitions présidentielles de ceux qu’on appelle –faute de mieux- « les centristes » et de nous affirmer que MM. Borloo, Villepin, Bayrou, pour ne citer qu’eux, n’ont aucune chance sous prétexte qu’ils n’auraient aucun programme, aucun parti structuré et surtout aucun électeur.
Ces beaux esprits oublient la fameuse phrase de Pompidou qui s’y connaissait « l’élection présidentielle se gagne toujours au centre ». Ils semblent surtout ignorer que depuis les débuts de la Vème République ces fameux centristes ont toujours obtenu, au premier tour des présidentielles, entre 15 et 18% des voix, de Lecanuet en 1965 à Bayrou en 2007, en passant par Poher, Giscard, Barre ou Balladur. Qu’on le veuille ou non, un bon nombre de nos compatriotes sont foncièrement centristes, qu’ils soient –même sans le savoir- des radicaux rentrés ou des démocrates-chrétiens honteux.
La présence d’un Front National oscillant entre 18 et 20% des voix, a, évidemment, changé la donne. La droite ne peut guère espérer représenter plus de 50% du corps électoral, or, si on retire 18% pour Marine Le Pen et autant pour les centristes, on s’aperçoit qu’il ne reste pratiquement plus que 14% pour le candidat « officiel » de cette droite. C’est ce qu’à l’Elysée on appelle « le scénario catastrophe » et auquel, bien sûr, on ne veut pas croire.
Pourtant, jamais le centre n’a eu devant lui un tel espace. Pendant longtemps ces centristes n’étaient que des supplétifs de la droite qui ralliaient, sans état d’âme, avant ou après le premier tour, l’UNR, le RPR ou l’UMP.
Oubliant la phrase de Pompidou et convaincu que la présidentielle se gagnait à droite, Sarkozy, après avoir essayé d’ouvrir à gauche en formant son premier gouvernement, en 2007, a effectué « un virage à droite toute » et « droitisé » à outrance l’UYMP en faisant fuir tous ceux que l’UMP avait vocation à ancrer dans la majorité présidentielle.
Pendant un temps, on avait vu que la candidature de Dominique Strauss-Kahn séduisait une partie de cet électorat devenu orphelin et c’est ce qui expliquait les scores stupéfiants qu’on accordait au directeur général du FMI avec 60, voire même 65% des voix. Or, ni Hollande ni Martine Aubry ne vont hériter de ces centristes, une seconde fois orphelins.
Certes, pour l’instant, à part Villepin avec des propositions audacieuses et qui n’ont pas plu, aucun de ces centristes n’a présenté de programme. Mais les Français ne lisent plus guère les programmes auxquels ils ne croient plus et qui ne sont d’ailleurs jamais appliqués, et il suffira à ces centristes de se présenter en farouches anti-sarkozistes, ce qu’ils sont tous devenus, pour attirer les chalands.
Reste à savoir s’ils seront assez bêtes pour aller en ordre dispersé à la bataille ou s’ils parviendront à se mettre d’accord sur une candidature unique. A toi Matignon, à moi d’Elysée. Dans le premier cas, chacun pourra espérer jouer les Chevènement de 2002 et faire éliminer Sarkozy dès la premier tour, certains paraissent déjà s’en contenter. Dans le second cas, c’est toute la géographie politique française qui pourrait être bouleversée.
Ils ont tout l’été pour s’entredéchirer ou devenir raisonnables. Jamais autant qu’aujourd’hui, le centre et une bonne partie de la droite n’ont été à la recherche d’un homme providentiel. « Français moyens, ni de droite, ni de gauche, recherchent désespérément candidat présentable ».

Mots-clefs : ,