« Grâce » à Nicolas Sarkozy, nous voilà en guerre dans trois pays. L’Afghanistan, bien sûr, mais maintenant nous bombardons aussi la Libye et nous tirons au canon en Côte d’Ivoire. Nous sommes les grands guerriers de l’univers !
Le chômage augmente, il a fallu réviser notre espérance de croissance à la baisse, notre balance du commerce extérieur est désespérément négative, jamais le pays n’a connu une telle crise de conscience, jamais un chef d’Etat n’a été aussi impopulaire mais Nicolas Sarkozy fait la guerre aux quatre coins de la planète, pour passer le temps, comme Louis XVI partait à la chasse le 14 juillet 1789.
Naturellement, il nous raconte qu’en Afghanistan c’est pour lutter contre les Talibans et le terrorisme international, qu’en Libye c’est pour protéger les populations civiles contre la folie d’un dictateur sanguinaire et qu’en Côte d’Ivoire c’est pour faire respecter les résultats d’une élection présidentielle.
Nous pourrions lui faire remarquer qu’en Afghanistan nous allons célébrer, cette année, les dix ans de l’intervention des troupes de la coalition et que les Talibans contrôlent maintenant les trois-quarts du pays, qu’en Libye nous soutenons des rebelles dont nous ignorons totalement la légitimité et qui pourraient bien ressembler davantage à des Talibans qu’à des démocrates et qu’en Côte d’Ivoire il n’est pas sûr que les hommes de Ouattara aient commis moins de massacres que ceux de Gbagbo.
Nous pourrions aussi lui demander si le rôle de la France ne serait pas de rechercher des solutions pacifiques, de tenter d’arbitrer entre les différents protagonistes, d’offrir des issues à ces crises plutôt que de tirer dans le tas.
Il est évident que les tribus afghanes finiront un jour par s’entendre entre elles, ou du moins par trouver une issue sans doute séparatiste à leur conflit, tout comme les tribus de Tripolitaine et de Cyrénaïque, tout comme les tribus du Nord et du Sud de la Côte d’Ivoire. Et alors ils seront tous d’accord pour nous reprocher d’avoir massacré leurs populations civiles et d’avoir voulu leur imposer une solution au nom de ce qu’ils appelleront l’impérialisme néocolonial.
Sarkozy, chef suprême de nos armées, a-t-il prévenu notre Etat-Major qu’après l’Afghanistan, la Libye et la Côte d’Ivoire, il allait falloir envoyer, au plus vite et dans un premier temps, nos Rafales bombarder Damas, pour chasser l’abominable Assad, Sanaa, pour obliger le vieux Saleh à quitter le pouvoir, Rangoon pour faire fuir l’odieuse dictature birmane, Pékin pour renverser l’insupportable régime communiste ?
De quoi nous mêlons-nous et qu’allons-nous faire dans toutes ces galères en jouant les justiciers, les moralistes, les légalistes ? Sarkozy n’a-t-il pas compris que le « droit d’ingérence », cher à son ancien ami Kouchner, était non seulement une monstruosité intellectuelle mais, aussi et surtout, un piège mortel pour les anciennes grandes puissances qui s’imaginaient pouvoir encore dicter leurs volontés aux petits pays ?
La France avait pu retrouver sa place dans le concert des nations grâce au discours de Phom-Penh, au discours de Cancun, au discours de Villepin à l’ONU. Pas en envoyant ses parachutistes se faire tirer comme des lapins au Tchad, au Liban ou en Afghanistan.
Certes, Sarkozy veut faire du vent, de l’esbroufe, du cinéma, pour nous faire oublier tous ses échecs, en jouant les grands chefs de guerre. Mais en transformant nos soldats en gendarmes du monde et bien souvent en supplétifs des Etats-Unis, il donne une image épouvantable et ridicule de la France. Il suffit de lire la presse indienne ou brésilienne, sans parler de la chinoise ou de la russe, pour s’apercevoir qu’en bombardant Tripoli ou Abidjan nous n’apparaissons pas comme les grands défenseurs des Droits de l’Homme.

Mots-clefs : , ,