Ils commencent à nous « tanner » avec les racines. Après Christian Jacob, nouveau président du groupe UMP à l’Assemblée, qui reprochait à Strauss-Kahn de ne pas avoir ses « racines » dans « nos terroirs », voici Laurent Wauquiez, ministre des Affaires européennes, qui reproche au même DSK de ne pas avoir ses « racines » dans… la Haute-Loire !
Si les amis de Nicolas Sarkozy entendent nous faire savoir que Strauss-Kahn est juif et qu’il ne peut donc pas être élu président de la République française qu’ils nous le disent carrément. Mais ils risquent fort d’avoir des déconvenues.
D’abord, parce que tous les Français savent parfaitement, et depuis toujours, que Strauss-Kahn, sa femme, ses parents, ses enfants sont juifs et que bien rares sont ceux, jusqu’à présent, qui ont eu l’idée de le lui reprocher. Il y a sûrement encore en France quelques antisémites mais, dans leur écrasante majorité, les Français détestent l’antisémitisme. L’affaire Dreyfus est un mauvais souvenir oublié depuis longtemps.
Ensuite, parce que si on entre dans ce genre de débat nauséabond et qu’on tente d’accrocher des étoiles jaunes aux revers des uns et des autres, on va rapidement en venir à se demander si les racines de la famille Sarkozy sont typiquement françaises et si Jean-François Copé, patron de l’UMP, ne serait pas un peu ashkénaze par son père et sépharade par sa mère.
L’ennui avec ces dérapages impardonnables (surtout de la part d’un normalien, agrégé d’histoire et énarque comme Wauquiez) c’est qu’ils interviennent dans une ambiance déjà pourrie et qu’on a donc l’impression qu’il s’agit moins de dérapages que d’une stratégie savamment préparée.
Débat sur l’identité nationale, stigmatisation des Français « de fraîche date », chasse aux Roms, laïcité positive, discours de Latran, discours de Grenoble, héritage chrétien de la France, débat sur la place de l’Islam en France, Nicolas Sarkozy de Nagy-Bocsa aurait-il le ridicule de vouloir nous faire croire qu’il est le gardien vigilant de la pureté de notre race gauloise ?
Où veut-il en venir ? Veut-il, pour tenter de récupérer quelques voix de l’extrême-droite (qu’il ne récupérera plus jamais) provoquer un réveil du nationalisme le plus exacerbé d’antan sur le thème cher à Le Pen (père) de « La France aux Français », « Les Français d’abord », « Les Arabes à la mer » ?
Affolé par la montée dans les sondages de Marine Le Pen, il ne se rend même pas compte que ce sont là des thèmes totalement dépassés. Les Français veulent du travail pour les chômeurs, une amélioration de leur vie quotidienne qui se dégrade considérablement, une baisse des prélèvements obligatoires et des déficits catastrophiques, la protection de leurs personnes et de leurs biens, un avenir pour leurs enfants. Les Français s’inquiètent beaucoup plus de nos quatre millions de chômeurs, des sept millions de nos compatriotes qui vivent sous la ligne de pauvreté que des quelques Musulmans qui n’ont pas de mosquée pour faire leur prière et dont les femmes sont voilées.
Ces Français voudraient aussi retrouver une ambiance apaisée, presque fraternelle où le gouvernement n’aurait pas comme seul programme la chasse aux délinquants, la chasse aux clandestins, la chasse aux Arabes, et maintenant sans doute la chasse aux Juifs.
Nos compatriotes ont bien des défauts mais, tout en reconnaissant les dangers d’une immigration encore plus massive qui nous guette, ils sont attachés à une France hospitalière, « terre d’asile », quand on disait « Heureux comme un Juif en France » et ils savent parfaitement que leur « grand et vieux pays » s’est façonné au cours des siècles en accueillant des gens venus d’ailleurs et qu’aujourd’hui, avec les élucubrations malsaines de ceux qui le gouvernent, il risque fort de perdre son âme. Or, cette âme, c’est à peu près tout ce qui nous reste.
Les Français détestent avoir honte de leurs dirigeants. Et là, ils nous font honte.

Mots-clefs : , , ,