Ces dernières vacances de Noël risquent de coûter très cher à nos dirigeants, même si, sur le coup, elles ne leur ont pas coûté un sou. Il faut dire qu’ils ne se sont ni privés ni gênés.
Nicolas Sarkozy et Carla Bruni ont réveillonné à Marrakech, Michèle Alliot-Marie et son compagnon Patrick Ollier en Tunisie et on a appris, hier, que François Fillon et sa femme étaient allés en Haute-Egypte. C’est beau d’être riche et de pouvoir ainsi s’offrir des vacances de milliardaire.
L’ennui c’est que le couple présidentiel, le couple Affaires Etrangères-Relations avec le Parlement et le couple de Matignon ne se sont pas offert ces petites vacances paradisiaques mais qu’ils se les ont fait offrir, Sarkozy, par le roi Mohammed VI, Alliot-Marie, par un copain de Ben Ali et, Fillon, par Moubarak. Trois chefs d’Etat de leurs amis mais qui ne font pas partie des gens qu’on aimerait recevoir à dîner chez soi.
On comprend soudain pourquoi Fillon et Sarkozy ont pris la défense d’Alliot-Marie. Ce n’était pas par « solidarité gouvernementale », comme on aurait pu le croire, c’était par… complicité.
On va, peut-être, apprendre dans les jours prochains que Juppé et bobonne ont réveillonné chez Kadhafy, que Roselyne Bachelot et son moutard ont passé les fêtes chez le fils Bongo ou en Corée du Nord, qu’Hortefeux et les siens étaient à la table de la junte de Birmanie et que Besson et sa nouvelle épouse tunisienne ont partagé la dinde avec la famille de Fidel Castro. Tout cela, bien sûr, non pas « aux frais de la République » mais aux frais de ces généreux dictateurs toujours si hospitaliers.
Dommage que le Chah, Bokassa et Ceaucescu ne soient plus de ce monde. La chute des dictatures (même si, comme en Iran, elles sont remplacées par des théocraties bien pires) réduit considérablement les possibilités de « vacances à l’œil ».
On peut d’ailleurs se demander si tous les derniers tyrans de la planète vont continuer à offrir aux « responsables » français leurs jets privés, leurs palais des mille et une nuits et leurs hôtels de (très grand) luxe.
Si la révolution des masses populaires n’a pas (encore ?) commencé au Maroc malgré le passage de Sarkozy, il a suffi qu’Alliot-Marie et Patrick Ollier prennent quelques bains de mer sur les plages tunisiennes pour que « la Révolution de jasmin » prenne, elle, des proportions considérables et à peine François Fillon avait-il visité le temple d’Abou Simbel que la place Tahrir se remplissait de manifestants mécontents. Nous savions déjà que nos dirigeants portaient la poisse, maintenant ils l’exportent.
Certains amis de ce blog trouvent qu’on en fait trop à propos de ces « dérives » qu’ils ont tendance à considérer comme des « peccadilles ». Et ils rappellent qu’il y a aujourd’hui d’autres sujets d’indignation.
C’est vrai. On peut même dire que les Français ont l’embarras du choix. Ils peuvent s’indigner : 1) devant l’effondrement de la France dont la dette continue à se creuser et dont la balance du commerce extérieur vient encore d’accroître son déficit, 2) devant la dégradation de leur vie quotidienne avec un chômage qui augmente, une baisse des revenus généralisée pour toutes les classes moyennes, une hausse de tous les prélèvements obligatoires, une déliquescence de tous les services publics, 3) devant les dernières attaques iniques du chef de l’Etat contre la Justice qui ont provoqué une « grève » sans précédent de la plupart de nos tribunaux, 4) devant ces « peccadilles » de nos dirigeants qui donnent une bien piètre image de la France à travers le monde.
Mais si ces « peccadilles » sont devenues des « affaires d’Etat » c’est précisément parce que la France s’effondre de plus en plus, parce que la vie quotidienne des Français se dégrade chaque jour davantage et parce que le chef de l’Etat, empêtré dans ses échecs et ses contradictions, continue à multiplier les provocations les plus démagogiques.
Un pays qui dégringole, qui compte plus de 4 millions de chômeurs, 8 millions de gens qui vivent sous la ligne de pauvreté et qui voit son chef de l’Etat dire et faire n’importe quoi, ne peut pas supporter que ses dirigeants aillent se dorer au soleil dans les palais royaux de Marrakech, les hôtels de luxe tunisiens et les felouques de la Haute-Egypte.
Et quand il apprend, en plus, que c’est par copinage avec des régimes pourris, çà le rend fou. Même les peuples décadents ont un minimum de dignité.
Le peuple manque de pain et au château on se goinfre de brioches avec de la confiture qui pue la corruption ! Sarkozy semble ignorer que l’Affaire du collier, en 1786, une « peccadille », a eu beaucoup plus d’importance dans l’éveil de la Révolution de 1789 que tout ce qu’avaient pu écrire nos Encyclopédistes.
Les « dérives » de la Cour, des « peccadilles »,  ont souvent provoqué la colère du peuple.

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