Boillon, un « bébé Sarko »
En principe, un ambassadeur de France représente la France dans le pays où il est accrédité. On imagine donc qu’il a une certaine dignité, voire un peu d’allure.
Dans bien des régions de la planète, la France est encore (était encore ?) considérée comme une grande nation. Notre culture, notre histoire, le souvenir de de Gaulle, notre siège permanent au Conseil de Sécurité de l’Onu, notre place de cinquième puissance mondiale nous donnent encore aux yeux de quelques-uns un certain prestige même si notre déconfiture économique et une accumulation d’erreurs politiques récentes ont considérablement terni notre image.
Pour des raisons professionnelles, j’ai beaucoup fréquenté nos ambassadeurs tout autour du monde pendant plusieurs décennies. Le plus souvent, j’ai rencontré des hommes de grande qualité. Certains étaient peut-être un peu somnolents mais, pour la plupart, ils étaient animés par la conscience de leur mission et réussissaient tant bien que mal à sauver les apparences. Nos ambassadeurs ne méritent sans doute pas le mépris ironique dont ils sont victimes depuis quelques années.
Seulement voilà, un ambassadeur de France représente aussi le chef de l’Etat. D’abord, parce qu’il est nommé en Conseil des ministres par l’Elysée, ensuite, parce que, consciemment ou non, il se croit généralement obligé de singer le président de la République. J’ai connu des ambassadeurs qui avaient successivement pris la voix de de Gaulle, adopté la bonhommie tout en rondeurs de Pompidou, joué la fausse élégance pointue de Giscard, porté le chapeau de Mitterrand et qui vous servaient de la tête de veau chiraquienne.
Alors, bien sûr, aujourd’hui, c’est la catastrophe.
A peine arrivé à Tunis, notre nouvel ambassadeur est conspué par les foules tunisiennes. C’est la première fois dans l’histoire de la diplomatie française que des manifestations populaires ont lieu pour réclamer le départ d’un ambassadeur de France. « Boris, casse-toi ! », « Boillon, dégage ! » scandaient, hier, les Tunisiens devant notre ambassade.
Pourquoi ? Tout simplement parce que Boris Boillon s’est conduit comme un voyou en traitant plus bas que terre, avec un mépris stupéfiant, la presse tunisienne devant laquelle il se présentait et en utilisant un vocabulaire de loubard. Il a refusé de répondre « aux questions à la con » qu’on lui posait, il s’est prétendu « d’un autre niveau » que ses interlocuteurs et a fini par partir en claquant la porte. Naturellement, l’enregistrement de cette scène pitoyable a immédiatement été diffusé en boucle sur Internet.
L’imbécile ! Arrivé de Bagdad où, entouré de gardes du corps, il jouait au Rambo devant les caméras complaisantes, Boillon n’a pas compris qu’aujourd’hui l’ambassadeur de France à Tunis était dans une situation un peu délicate. Il lui faudrait faire oublier les liens intimes de Paris avec le régime de Ben Ali, la stupéfiante déclaration d’Alliot-Marie devant l’Assemblée proposant à Ben Ali le « savoir-faire » de la police française pour réprimer les manifestations et, plus encore, les vacances « d’affaires » de la même ministre ses Affaires étrangères pendant les fêtes, aux frais d’un oligarque du régime chancelant avec lequel ses propres parents faisaient du business.
Boillon aurait donc dû « la jouer modeste », un rien contrit et, en tout cas, charmeur et… bien élevé. Comme un ambassadeur de France.
Hélas, au lieu d’avoir été formé à l’ENA et au Quai d’Orsay, Boillon a fait ses classes au ministère de l’Intérieur comme conseiller de Nicolas Sarkozy puis à l’Elysée. Toujours dans l’ombre du même. Il est ce qu’on pourrait appeler un « bébé Sarko ». Il se croit donc tout permis, joue les casseurs, aime faire de la provocation, méprise la terre entière, se ridiculise et se fait immédiatement détester.
Il se vante de ne pas avoir « le style Quai d’Orsay ». En effet, il a « le style Sarkozy ».
L’attitude de la France devant les événements tunisiens a d’ailleurs été un exemple parfait de ce style sarkozien. D’abord, l’Elysée, ignorant totalement le dossier, n’a rien vu venir, ensuite, on a multiplié les déclarations « coups de menton » à contretemps, enfin on a étalé sans pudeur le goût du « fric », des vacances aux frais des milliardaires et les liens qu’on avait tissés avec les corrompus.
Boillon ajoute la petite touche, typiquement sarkozienne, de la vulgarité méprisante.
Aujourd’hui, Sarkozy se vante des débuts du G20 (où l’on s’est contenté d’annoncer qu’on allait… établir la liste des problèmes à résoudre) mais en moins d’une semaine, par ses maladresses de casseurs d’assiettes, il a réussi à nous fâcher avec le Mexique et la Tunisie.
Certains font déjà le bilan économique et social du quinquennat. Le bilan diplomatique ne sera guère meilleur.
20 Fév 2011 12:47 1. Vivelnord
« Certains font déjà le bilan économique et social du quinquennat. Le bilan diplomatique ne sera guère meilleur. »
… sans parler du bilan « moral » !
Avant que Nicolas Sarkozy soit élu le 6 mai 2007 je croyais (sans en être intimement persuadé) que sa nuisance se limiterait aux frontières de l’hexagone mais là, en ce moment il fait vraiment très, très fort.
De plus en plus d’observateurs pensent que ce qui se passe de l’autre côté de la Méditerranée pourrait bien se produire chez nous !
Certes le contexte est très différent mais quand même …
Entre les deux tours de la dernière présidentielle j’avais commis et diffusé le document que vous pourrez lire à l’adresse suivante :
https://www.play-host.net/files/1298255337.pdf
Cela n’avait pas suffi à faire changer le cours des choses mais, bon, je pouvais encore me regarder dans un miroir.
J’avais donné comme titre « Le syndrome de lybonrehcT » ,tout un programme !
Il reste 426 jours (au maximum, serais-je tenté d’écrire aujourd’hui) avant le 1er tour des prochaines élections présidentielles …
20 Fév 2011 13:12 2. Patrick-Louis Vincent
Sur la forme, vous avez raison, M. Desjardin, M. Boillon est un cuistre. Mais je redis ce que j’ai répondu au billet précédant. M. Boillon n’a de compte à rendre qu’à son ministre de tutelle (Mme Alliot-Marie) et au président de la République. M. Boillon a été nommé pour remplacer un ambassadeur que ses supérieurs ont jugé incompétent. A eux de voir si celui-ci l’est moins ou davantage. Mais il n’a aucun compte à rendre aux excités de la rue qui manifestent contre tout et n’importe quoi, et qui enfoncent leur pays, progressivement, dans la chienlit.
Enfin, je commence à trouver lassant que l’on reproche, sans cesse, aux pays occidentaux en général, et à la France, en particulier, d’avoir soutenu des dictatures et qu’il faudrait faire, aujourd’hui, notre mea culpa. Ce point de vue est ridicule. Les états sont indépendants et les peuples souverains. Nous ne sommes pas responsables des régimes politiques qui sévissent dans les pays étrangers. Nous ne sommes pas non plus responsables si les peuples de ces pays ont attendu 30 ans pour se révolter. La France, au contraire, plus que tous autres pays, a usé du droit d’asile pour accueillir les dissidents de tous les pays du monde, y compris ceux du Maghreb.
Quant aux contrats commerciaux que l’on passe avec les états étrangers, si vous pensez que nous ne devons commercer qu’avec les démocraties, cela restreint considérablement nos possibilités d’exportation, alors que nous faisons déjà 50 milliards de déficits commerciaux par an. Ainsi, ne vendons plus d’avions aux émirats et à l’Arabie Saoudite, fermons nos frontières à la Chine, et même à la Russie, qui n’est démocratique qu’en façade.
Arrêtons de tout mélanger et de nous faire une bonne conscience à peu de frais.
20 Fév 2011 15:42 3. soreau
Chaque fois que la France a oublié ses principes républicains ,elle l’a payé;heureusement Sarkozy ce n’est pas la France.
20 Fév 2011 16:18 4. dugas
Bref, comme le dit Mr Vincent, continuons comme avant.
Le monde change, mais la France veut rester immobile. Après tout, c’est ce que demandent les politiciens (« sauvegardons notre système social le meilleur au monde »), les syndicalistes (« pas touche aux avantages acquis »), les journalistes (« vive la liberte de la presse, surtout de gauche »).
Faut pas s’étonner si les révolutions arabes s’exportent un jour chez nous. Tout va si vite que le jour où ca arrivera, on se demandera comment on ne l’a pas vu venir. Pourtant, c’est visible pour celui qui veut bien voir et entendre ce qui se dit autour de lui…
20 Fév 2011 18:33 5. Patrick-Louis Vincent
@Dugas
Deux reflexions, suite à votre commentaire. La première, c’est qu’il me paraît, à cette heure, tout à fait exagéré de parler de révolutions pour ce qui s’est passé en Tunisie et en Egypte. Il y a eu, certes, une révolte populaire, pour des raisons économliques (hausse des prix des denrées alimentaires) qui ont abouti à la démission des deux vieillards qui avaient la fonction de chefs d’état. Mais, que s’est-il passé ensuite ? Y a-t-il changement de régimes ? Non. Le partie de Ben Ali est toujours au pouvoir en Tunisie et c’est l’armée qui a repris le pouvoir en Egypte, armée des rangs de laquelle Moubarak est issu. Pas de changement de régime donc pas de révolution, pour l’instant du moins.
Vous dîtes, le monde change et la France veut rester immobile. Mais quelle France, quels Français ? Ceux qui détiennent le pouvoir et les privilèges. Tous ceux qui profitent du système (vous les avez cités). Pour l’instant, les autres, le peuple, ne bougent pas : les ouvriers non syndiqués, les employés, les commerçants, les petits patrons, les policiers, les militaires, les paysans. Pour l’instant ils observent et s’informent. Mais, dès que système vacillera, c’est-à-dire dès la prochaine secousse économique, tout ce système de prébendes sera mis en cause par une révolte générale. Ce n’est qu’une question de temps.
Les Français ont beaucoup de patience. Ils attendent toujours qu’un système soit complètement usé et bloqué pour en changer, généralement, violemment.
Je suis très étonné que personne ne parle de la représentation nationale des Français au Parlement. Le mode de scrutin à deux tours et le financement des partis politiques par l’impôt au profit des seuls partis représentés au Parlement, fait que de nombreuses catégories de Français ne sont pas représentées au Parlement : hypertrophie des parlementaires issus de la fonction publique, non représentation des commerçants et des artisans, non représentation des Français issues de l’immigration, sous représentation des femmes, non représentation des partis d’extrême gauche, non représentation du Front National. Mis bout à bout, cela fait au moins 70% des Français qui ne sont pas représentés au Parlement. Comment voulez-vous que ce même Parlement puisse défendre les intérêts des Français, par la voie démocratique. C’est impossible, et comme c’est impossible, un jour où l’autre, la rue renversera le parlement. Et ce ne sera pas, comme au Maghreb, pour laisser le pouvoir en place. Les révolutions, en France, on connaît. L’on a une certaine expérience pour en avoir raté quelques unes et réussi d’autres.
20 Fév 2011 18:48 6. Houzi
M. VINCENT confond à dessein relations diplomatiques et business personnel. Encore une fois, ce qui est reproché à MAM ce n’est pas d’avoir reçu l’ambassadeur de BEN ALI, ni d’avoir eu des contacts avec ce dernier par la voie diplomatique.
Encore que si l’on se référait aux « fondamentaux » du programme de SARKOZY, cuvée 2007, quelques rappels aux Droits de l’Homme avec menaces de sanctions économiques eussent été à l’époque, les bienvenus.
Non, ce qui est reproché à MAM et accessoirement à son concubin, c’est de se faire inviter à titre personnel, à titre gratuit par ce dictateur et de faire du business avec lui par Pépé et Mémé interposés qui vont jouer les gérants de paille pour le compte de leur fille affairiste.
Le principe selon lequel un ministre de la FRANCE doit préserver son indépendance à l’égard d’une puissance étrangère, s’applique a fortiori lorsque ledit dirigeant est un tortionnaire. Le copinage n’est jamais bon, surtout avec un tyran.
M. VINCENT ne comprend pas le B.A. BA du code déonotlogique et moral qui devrait conduire chacun de nos ministres et Président.
Quant à Boris BOILLON, faut le voir dans une video dans une rue de Bagdad (?), avec ses lunettes de mafieux. Il transpire le Sarkozysme mal élevé : le genre à tapoter dans le dos de son interlocuteur, à parler avec les mains, à incanter l’émotion dans l’instant pour ensuite l’insulter…
20 Fév 2011 22:47 7. Houzi
A propos de coups de mentons diplomatiques, on en est où en COTE D’IVOIRE ?
SARKOZY n’avait-il pas tel un huissier à la fin de la période hivernale, fait injonction au squatter LAURENT BAGBO de déguerpir sans délai ?
Encore un coup un coup de menton dans l’eau ?
Avec ce clown échappé de NEUILLY, la France fait rigoler le monde entier. C’est tous les jours un nouveau numéro. Il n’y a pas relâche. SARKOZY et sa bande meilleurs que les BOUGLIONE.
On va être réduits à faire comme MAM, passer nos vacances en DORDOGNE, pour éviter les quolibets à l’étranger.
En désespoir de cause, on peut essayer de se faire passer pour Belges.
21 Fév 2011 11:43 8. sdz
Sarkozy nous aligne sur un bloc occidental, via le traité de Lisbonne, partant de là nos positions s’effacent les unes après les autres: l’Union européenne est en train de signer un accord de libre-échange avec la Corée du Sud, on ne parle plus de notre pays… Comment se faire respecter derrière?
La France n’est plus gouvernée comme dans une République, mais comme une annexe d’un système oligarchique pour ne pas dire néo-impérialiste. Une fois qu’on l’a compris, tous les éléments s’articulent correctement les uns par rapport à autres pour éclairer la politique française de ces dernières décennies…
Ainsi, je rappelle que nous n’avons pas de politique maritime, avec le deuxième espace maritime au monde; nous n’avons pas plus de politique francophone, notamment en Afrique où se trouve pourtant nombre de nos intérêts vitaux. J’estime par ailleurs que les « pros » de l’Ena ou du Quai d’Orsay sont beaucoup moins dignes d’éloges que vous le laissez supposer. Ils auraient pu se faire entendre il y a longtemps…
cf blog IRC
21 Fév 2011 14:15 9. Houzi
@sdz
les pros de l’ENA ou du QUAI D’ORSAY n’y sont pour rien. CE sont des exécutants. Nos politiques et leurs électeurs sont seuls responsables.
24 Fév 2011 12:02 10. Houzi
Je rigole : je viens de lire sur internet « l’ambassadeur en slip contre-attaque ». Le SARKO-BOY a annoncé vouloir engager un procès à toute personne et tout media qui utiliserait la photo qu’il a chargée sur Copains d’Avant et où il apparaît en slip de bain…
Il va demander des droits d’auteur ? C’est la seule chose qu’il puisse demander.
Quant à se plaindre d’une violation de la vie privée, il irait dans le mur : en chargeant sa photo sur ce site, il l’a rendue publique.
Qu’il retourne dans les caves de la place BEAUVAU ! Il nous fait honte.
24 Fév 2011 13:16 11. Houzi
La suite des quolibets dont l’amabassadeur en slip fait l’objet… Il « avait déjà amusé les diplomates américains en poste à Paris, il y a un peu plus de trois ans. Lors d’une rencontre de travail, ils remarquent que ce jeune conseiller présidentiel, 37 ans à l’époque, n’hésite pas à «se vanter» de son importance auprès de Nicolas Sarkozy. »
Encore un « Moi je, moi je, moi je… »