Le supplice chinois
Il faut bien dire que désormais les Européens sont ridicules dès qu’ils se retrouvent en face des Chinois. Le vieux continent n’est plus « le Centre du monde » qu’il a été pendant quelques siècles et qui a repris sa place d’origine, au coeur de « l’Empire du milieu », c’est-à-dire à Pékin. Comme l’avait annoncé Napoléon, le monde tremble depuis que la Chine s’est réveillée. Et d’autant plus qu’elle s’est réveillée en sursaut, avec un réveil triomphant.
La visite d’Etat que vient d’effectuer à Paris et à Nice Hu Jintao l’a, une fois de plus, démontré. Nous sommes tout petits, petits devant ce milliard et demi de Chinois conquérants.
Il y a quelque chose de dérisoire à voir nos officiels se réjouir des contrats que, dans sa grande bonté, le président chinois nous a concédés. Il nous a jeté à la volée ces seize milliards de promesses d’achat comme les seigneurs d’antan jetaient des piécettes au bon peuple affamé. Merci, merci, notre bon maître !
L’opinion publique commencent d’ailleurs à ne plus se faire trop d’illusions sur ces annonces de promesses. A chaque voyage de Nicolas Sarkozy tout autour de la planète ou chaque fois qu’il reçoit à Paris un chef d’Etat un peu exotique, ce sont les mêmes cris de victoire. Notre commis-voyageur a raflé des contrats mirifiques.
Si on faisait l’addition de tout ce qu’il nous a annoncé, triomphant, de retour d’Inde, du Brésil, de Moscou, du Golf ou d’ailleurs, le ciel devrait être parcouru par nos Rafale, les déserts traversés par nos TGV et l’atome français aurait dû, depuis longtemps, remplacer toutes les autres formes d’énergie.
Or, nous n’avons toujours pas vendu un seul Rafale, ce sont les Allemands, voire les Japonais qui vendent maintenant des trains à grande vitesse, les malheurs de nos nouvelles centrales nucléaires découragent les acheteurs éventuels et même l’ami Medvedev ne veut plus de notre Mistral.
Certes, les patrons d’Airbus, d’Areva et de Total faisaient, hier, mine de sourire. La perspective de vendre aux Chinois cent-deux appareils, 20.000 tonnes d’uranium et une usine pétrochimique est évidemment réjouissante en cette période de disette.
Mais les sourires étaient un peu figés. Car nos généreux clients exigent maintenant non seulement qu’on leur fournisse le mode d’emploi mais aussi et surtout le mode de fabrication. Ils nous achètent moins un avion qu’un échantillon accompagné de tous ses secrets technologiques. Pour vendre nos « trucs » nous sommes obligés de leur livrer tous les moyens de les fabriquer eux-mêmes à leur tour. Nous pensions que, grâce à notre « avance technologique », nous n’avions rien à craindre de tous ces pays « émergeants » mais ils ont émergé et, pieds nus et la corde au cou, nous sommes contraints de leur livrer ces avancées.
Il faut d’ailleurs dire que ces pays n’ont plus guère besoin de nous. Le Brésil construit, tout seul, des avions de combat, l’Inde a construit, toute seule, une centrale nucléaire (et sa bombe), la Chine a construit, toute seule, son satellite. Dans dix ans, la vieille Europe n’aura plus aucune suprématie. Paul Valéry a écrit : « Les grandes civilisations ont appris qu’elles étaient mortelles ».
La visite de Hu Jintao aurait dû ouvrir les yeux de nos dirigeants. La crise qui vient de faire vaciller toutes nos économies (mais qui a épargné la Chine) n’est pas une crise financière mais bien une crise économique provoquée par les déséquilibres de la mondialisation.
Tout marchait bien (pour nous) tant qu’il y avait l’Occident qui produisait et qui consommait et que le reste de la planète végétait. Dès l’instant où le reste de la planète s’est mis à produire, sans consommer, et que nous avons continué à consommer (leurs produits) sans plus pouvoir produire, c’était évidemment la fin de notre hégémonie et des haricots. Nous nous endettions sans fin, ils s’enrichissaient de plus en plus.
Tant que les ouvriers chinois se contenteront d’un bol de riz (ce qui n’est plus tout à fait vrai) nous leur achèterons leurs produits et nous ne pourrons pas leur vendre les nôtres.
La mondialisation n’est supportable pour nous que si les règles du jeu sont les mêmes pour tous. Nous ne pourrons faire face au « péril jaune » que quand les Chinois auront un SMIC, des assurances familiales, chômage et maladie, les 35 heures et la retraite à 62 ans. Ce n’est pas demain la veille.
Et c’est ici que Nicolas Sarkozy a été le plus ridicule dans sa naïveté. L’un des grands avantages du commerce chinois est la valeur artificielle de la monnaie chinoise, le Yuan, sous-évalué de 40%.
Sarkozy veut que le G20 qu’il va présider s’attaque au problème des changes. Il ne veut plus que le dollar soit la monnaie de référence. Très bien. Mais il compte sur Hu Jintao pour l’aider à faire céder les Etats-Unis et à instaurer une nouvelle parité des devises internationales.
Comment peut-il s’imaginer une seule seconde que les Chinois vont, pour lui faire plaisir, accepter de réévaluer leur devise de 40% ? Comment n’a-t-il pas compris que dans cette guerre économique mondiale (entre les « anciens » Grands et les « nouveaux » grands) nous ne pouvions pas être du coté des Chinois et contre les Etats-Unis ?
Pour Hu Jintao, Sarkozy, l’ami du Dalaï Lama, n’est même plus un « tigre en papier ». Tout au plus un petit chaton en papier. Et après s’être amusé à la caresser dans le sens des poils pendant deux jours, il a bien l’intention de le jeter à la rivière. Le supplice chinois.
Mots-clefs : Chine, Hu-Jintao, mondialisation, Sarkozy
06 Nov 2010 12:45 1. pratclif
RT @t_desjardins: [Blog] Le supplice chinois – http://www.thierry-desjardins.fr/2010/11…
06 Nov 2010 13:53 2. Houzi
Nous les Occidentaux nous avons pêché par orgueil. Nous pensions que les Chinois ne seraient bons qu’à fabriquer nos slips et nos chaussettes et qu’en contrepartie, ils nous achèteraient notre haute technologie.
Raté à moitié ! Car ils nous vendent effectivement slips et chaussettes au point qu’en FRANCE, il n’y a plus d’usines textiles.
Mais les voici se baladant au-dessus de nos têtes dans l’espace, construisant des TGV plus rapides que les nôtres et exigeant avec succès que nous leur vendions le mode de fabrication des quelques biens qu’ils veulent enocre nous acheter.
BRAVO aux crânes d’oeuf de chez nous qui en ouvrant grand nos portes, ont détruit notre tissu industriel et instauré le régime social chinois comme modèle à suivre sous peine de ne pas être « compétitifs ».
Tout bénéf pour les multinationales qui jouent entre elles, au Monopoly. Et vas-y que je te ferme une usine en FRANCE après avoir touché des subventions de l’Europe, de la France et de la région et vas-y que j’en ouvre une au Vietnam (super ! c’est encore moins cher qu’en Chine)…
Le pire, c’est de constater que pour s’installer en CHINE ou pour y importer des biens, c’est tout un tintouin. Ils savent y faire en matière d’entrave à la circulation des biens. Comme les Coréens ou les Japonais.
Demandez à RENAULT, comment ça se passe pour vendre des Méganes à Tokyo.
Nous sommes les cocus du grand patronat français qui a vendu notre pays, au commerce international. Ceux du CAC410, ce sont des vandales. Regardez ce qu’ils ont fait à notre métallurgie, à notre industrie, à notre système social !
Souvenons des grands tremollos et des coups de menton de SARKOZY devant les ouvrirers d’Arcelor-Mittal… allez, tout ça à la casse, circulez , y’a rien à voir !
06 Nov 2010 17:27 3. Infraniouzes
Le plus terrible, le plus affligeant, c’est que notre petit Napoléon médiatique joue la partie en solo alors qu’il devrait s’abriter dans la forteresse Europe laquelle devrait ainsi parler d’une seule voix. Il est incroyable de voir qu’aucune discussion ou négociation n’a eu lieu en présence de MM Herman Van Rompuy et/ou José Barroso. On croit rêver.
Les Chinois doivent bien rigoler de voir comme nous sommes désunis. Tout ça finira mal. Mais pour l’heure, l’urgent c’est de savoir:
• Cékiki va être premier ministre ?
• Cékiki va être le candidat du PS ?
• Sarko a-t-il une chance de se succéder à lui-même ?
En dehors de ça, vous voyez quelque chose d’important ?
06 Nov 2010 19:24 4. diego149
Je vis en Amérique du Sud et je vois chaque jour qu’il y a 2 civilisations qui s’affrontent. Celle du travail (chez nous les gens travaillent 6 jours sur 7 et les magasins sont ouverts le dimanche)Asie, Amérique Latine et celle des avantages acquis et du repos, la vieille Europe. Chez nous les défilés et les grèves à répétition en France laissent perpléxes. Incmpréhension totale des gens d’ici qui pensent que pour gagner sa vie il faut faire des efforts et travailler.
Je me rappelle ce que m’avait dit un jour un ami sinomalaisien: mais que font les français avec tant de congés ils doivent s’ennuyer.
Il y a bien 2 philosophies qui sont incompatibles entre elles.
06 Nov 2010 21:09 5. Houzi
Qu’est-ce qu’il croit Diego149 que les Français sont des fainéants ? Il a déjà vu le métro parisien aux heures de pointe. Il croît que les rames sont pleines de Parisiens qui se baladent ?
La différence entre un homme libre et un esclave est justement la part réservée par l’homme libre à d’autres activités que le travail.
En France, on a tout ce qu’il faut et je ne vois pas pourquoi on devrait travailler comme des brutes. Les stocks de nos usines sont pleins. oh Diego, on va les mettre où les bagnoles que RENAULT fabriquera le dimanche ?
Toute une vie ne nous suffira pas pour lire tous les bons livres et regarder les bons films, découvrir le monde, aménager sa maison, visiter ses amis et parents, méditer, militer, philosopher.
Dans l’Antiquité, les sociétés qui ont connu les premières des avancées significatives en matière de philosophie, d’arts, de sciences et de techniques, ont été celles qui avaient produisaient suffisamment, pour penser à autre chose qu’à aller chercher à bouffer et bosser.
L’homme qui s’ennuie quand il ne travaille pas, souffre d’un déséquilibre psychologique significatif. L’être humain n’est pas un animal de trait.
Désolé pour Diego149, son ami n’appartient à aucune école de philosophie. C’est un âne bâté.
En effet, un âne ne fait jamais grève…
06 Nov 2010 21:52 6. diego149
Houzi je ne porte pas de jugement de valeur sur les français. Mais je rapporte simplement ce que je constate . Traiter d’âne baté quelqu’un qui n’a pas la même vision du monde que vous, me fait comprendre pourquoi les français passent pour des donneurs de leçon méprisants ,avec un ego surdimensionné. Je ne sais pas si vous avez beaucoup voyagé hors d’Europe. On ne le dirait pas. On verra bien à long terme si c’est votre mode de vie qui l’emporte.
06 Nov 2010 22:46 7. Houzi
Qui a commencé par traiter les Français de fainéants ? « pour gagner sa vie il faut faire des efforts et travailler » c’est bien de vous ce sophisme sous forme de savante leçon donnée aux Français ? Vous croyez qu’ils vous ont attendu les Français pour bosser ?
On en a assez de cette propagande visant à faire passer les Français pour des fainéants. Le pire, c’est que ce sont des Français qui en sont les auteurs et les propagateurs. Des Français de Droite à qui les grèves filent des boutons!
C’est vous-même qui portez des jugements méprisants à l’emporte-pièce sur les Français parce qu’ils exercent le droit de grève qui leur est reconnu par la constitution.
Lisez vos prose, Diego et vous verrez que c’est vous qui vous posez en donneur de leçon aux Français.
Ah bosser le dimanche, la belle affaire ! Et avec ça vous fermez les hôtels, les campings, les bouquinistes sur les quais de la Seine.
Parce que M. Diego pense qu’en dehors des mines de cuivre chiliennes, il n’y a pas d’autre activité possible. Vous n’avez jamais entendu parler du business (puisque vous ne voyez que ça dans la vie) du tourisme, des loisirs, de l’aménagement des maisons, du bricolage, de la culture (l’exposition Monet en ce moment à PARIS, ça rapporte du fric… rassurez-vous M. Diego. Y a pas que le cuivre chilien et la récolte du guano… pour faire du business. LEROY-MERLIN, TRUFFAULT vous connaissez. ILs font des milliars de chiffre d’affaires dans le bricolage et le jardinage
Quand vous aurez mis les Français à pousser des wagonnets dans les mines le dimanche, LEROY-MERLIN et TRUFFAULT iront s’intaller en PATAGONIE !
06 Nov 2010 23:30 8. Teddy Bear
Vous avez en grande partie raison, toutefois il faut tout de même relativiser :
– la Chine a également ses propres problèmes à résoudre qui ne sont pas des moindres.
– on tenait un discours relativement semblable sur le Japon dans les années 80.
– la solution réside dans la capacité d’adaptation des pays occidentaux aux nouvelles règles internationales, il y a un grand chemin à faire ( notamment en France ) mais tout n’est pas perdu ! Il y a des français qui savent encore nager.
Pour ce qui me concerne une seule certitude, « l’Occident de papa est mort ». Les français d’aujourd’hui sont comme les pieds-noirs qui durant les années 50 n’avaient pas compris que « l’Algérie de papa », c’était fini.
06 Nov 2010 23:59 9. tdesjardins
Restons calmes, restons calmes! Si jamais ce petit blog a un intérêt c’est de permettre à chacun d’entre nous d’écrire ce qu’il a sur le coeur, sans que nous soyons tous d’accord.
Je ne voudrais vraiment pas qu’on en arrive aux mains. Merci à tous de faire un effort. TD
07 Nov 2010 17:33 10. Teddy Bear
Si toutefois votre message s’adresse à mes propos, veuillez m’en excusez. Un oubli : Avec nos produits technologiques ( centrale nucléaire, avions, trains… )part notre individualisme, nous verrons bien lorsque le chinois arrêtera de dire « nous » mais « je », et qu’il sera déchiré entre l’appartenance au groupe et sa volonté de devenir un individu à l’occidentale. Il lui faudra lui aussi s’adapter.