Pyrrhus ne l’a pas emporté au paradis
Nombreux étaient ceux, ces derniers temps, qui pensaient, les uns en l’espérant, les autres en le redoutant, que la levée de bouclier massive contre la réforme des retraites, les gigantesques manifestations de rue qui se succédaient et les grèves qui se multipliaient allaient conduire le pays à connaître un nouveau « mai 68 ».
Il semble bien que les choses s’apaisent et que ce ne soit pas encore pour cette fois.
La loi a été votée, les jeunes sont partis en vacances et les syndicats, étonnés eux-mêmes du succès des mobilisations qu’ils avaient décrétées, n’ont envie ni de jouer avec le feu et de se faire déborder par les extrémistes ni même de reconnaître que, la lassitude venant, le mouvement s’essouffle.
On va donc, sans doute, en rester là… pour le moment. Avec un Sarkozy fier d’avoir fait passer « en force » sa réforme et des syndicats (et une opposition) fiers d’avoir réussi à organiser une telle mobilisation contre le pouvoir.
En attendant de voir la suite des événements, ce qui est intéressant c’est d’essayer de comprendre pourquoi tout n’a pas dégénéré.
Presque tous les ingrédients nécessaires pour une explosion semblaient réunis.
Jamais, avant Sarkozy, aucun chef d’Etat n’avait été rejeté avec une telle violence. En 1968, les Français en avaient, sans doute, assez de de Gaulle mais ils ne le méprisaient pas. Or, aujourd’hui, les Français méprisent le président de la République, à cause de son style, de son allure, de ses volte-face, de ses promesses non tenues, de ses échecs.
Jamais, depuis les débuts de la Vème République, la situation économique et sociale du pays n’avait été aussi catastrophique avec 4 millions de chômeurs, 7 millions de Français vivant sous la ligne de pauvreté, une dette de 1.500 milliards, des déficits qui se creusent partout.
Jamais, sans doute, nous n’avions connu une telle crise morale. Pris entre la mondialisation, l’Europe et l’immigration, les Français ne savent plus ce que c’est qu’être français, ils ne voient plus d’autre avenir qu’un déclin programmé, ils ne font plus aucune confiance ni au personnel politique ni même à l’Etat maintenant qu’ils ont compris que l’Etat-providence était condamné.
Et pourtant, ils ont fini –semble-t-il et jusqu’à preuve du contraire- par se résigner. Personne n’a voulu élever des barricades ni même se lancer dans une grève générale.
Cette réforme des retraites n’était sans doute pas le bon prétexte. Même si nombreux sont ceux qui la contestent, tous les Français ont parfaitement conscience que, si on veut sauvegarder un système des retraites quel qu’il soit, il faudra, d’une manière ou d’une autre, travailler plus longtemps.
Pour faire une « révolution » il faut que la foule veuille « autre chose » et soit donc prête à se lancer dans l’aventure. Or, pour l’affaire des retraites, la foule voulait, au contraire, conserver ce qu’elle avait. Elle était sur la défensive, la protection d’un avantage acquis. Et on peut se demander si des gens qui veulent chausser leurs charentaises le plus tôt possible sont prêts à se battre, même contre un pouvoir honni.
Il faut aussi, pour mettre le feu aux poudres, une alliance objective entre les jeunes toujours prêts à en découdre et ceux qu’on pourrait appeler « les intellectuels ». Là, les jeunes n’ont fait que prendre le train en marche et il faut bien dire qu’il y avait quelque chose de ridicule chez ces lycéens et étudiants qui prétendaient se battre pour pouvoir jouir, dans quarante ans, d’une retraite à 60 ans. En 68, les jeunes voulaient se battre pour changer le monde. C’était, bien sûr, dérisoire mais ça avait tout de même plus d’allure.
Quant aux intellectuels, leur silence a été, pendant toute la crise, assourdissant. Au point qu’on peut se demander s’ils existent encore. En 1968, il y avait tout de même Jean-Paul Sartre pour souffler sur les braises.
On en arrive à la question de fond : un pays qui a vécu pendant des décennies dans l’assistanat généralisé, qui s’accroche à ses retraites, à ses pensions, à ses allocations a-t-il encore la force de s’insurger, même si on lui grignote, petit à petit, quelques-uns de ses privilèges ?
Les révolutionnaires sont toujours des gens qui n’ont « plus rien à perdre ». Or, aujourd’hui, il semble bien que les Français ne veuillent pas perdre le peu qui leur reste.
Les historiens à la mode aiment évoquer notre passé de révolutionnaires. Ils oublient pudiquement nos périodes de soumission, voire de collaboration.
Les Français aiment sans doute davantage Guizot que Robespierre. Ce qui n’est pas plus mal.
Reste que Sarkozy aurait tort de se croire le grand vainqueur de ce bras de fer. Il a remporté tout au plus une victoire à la Pyrrhus et le champ de bataille offre un bien triste spectacle. Il est toujours rejeté par une écrasante majorité de la population (il perd encore ce matin trois points dans le sondage Ifop-JDD à 70% de mécontents, record absolu dans l’histoire de la Vème République) et les « vaincus » sont plus forts que jamais, après avoir remporté la bataille de l’opinion et mobiliser plus de troupes que jamais.
Pyrrhus a d’ailleurs très mal fini…
24 Oct 2010 13:36 1. Houzi
Qu’on ne se méprenne pas.
Ce n’était pas pour se glisser plus tôt dans leurs charentaises que les Français se sont opposés à la contre-réforme des retraites. Et loin s’en faut pour que les lycées et les étudiants aient frisé le ridicule en s’associant aux protestations de leurs aînés avec lesquels ils se sont solidarisés..
C’est vrai que pour beaucoup de citoyens de « nos démocraties modernes » comme se plaisent à répéter nos journalistes accrédités, la solidarité est désormais un vain mot, un peu ridicule au regard du « chacun pour sa gueule » qui règne aujourd’hui.
On va y arriver à ce que chacun se fasse dans son coin son petit plan retraite et sa protection maladie privée à la carte, comme au Monopoly.
La ré(ac)forme des retraites est un des exemples de l’orientation malsaine donnée de façon plus générale à notre République par les réactionnaires libéraux.
Les adultes, comme les lycéens et étudiants descendus dans la rue, viennent dire tout haut à travers leur refus de cette réforme WOERTH (tout un poème)que cette société qu’on nous prépare, ils n’en veulent pas !
Et visiblement, beaucoup en FRANCE approuvent ce sursaut contre la régression sociale ambiante et permanente, alors que la FRANCE est un pays riche, loin du déclin annoncé par nos Cassandre qui espèrent ainsi nous faire accepter un nouveau tour de vis social.
Lisez donc le cahier spécial que vient de sortir le Canard Enchaîné sur le « Fric et la Politique »… E.D.I.F.I.A.N.T !
Un citoyen qui relève la tête, n’est en rien ridicule. Il est au contraire la fierté de la République.
24 Oct 2010 15:56 2. diego
Houzi ce que vous écrivez est du pur blabla gauchiste.
24 Oct 2010 17:23 3. Infraniouzes
Les Français ont des défauts mais il faut leur rendre grâce: si on examine le passé, bien des inventions scientifiques, des idées philosophiques ou politiques, des novations dans l’art et les sports viennent de notre pays. Il ne s’agit pas de s’appesantir sur un passé glorieux mais de faire un rapide bilan.
Hors aujourd’hui que voit on ? Un pays quasiment à l’arrêt où l’initiative individuelle est impossible tellement les Français sont corsetés par un arsenal de lois, étouffés par une administration tentaculaire, méprisés par une classe politique imbécile et frileuse, manipulés par des syndicats arrogants de suffisance mais repliés sur le strict domaine public où il n’y a aucun risque. Dans ce pays la devise est: IL EST INTERDIT D’ENTREPRENDRE sauf avec l’aval exprès des susnommés.
Il est donc logique que les Français se replient sur leurs acquis et défendent bec et ongle ce qui leur semble les derniers bastions d’une brillante civilisation mais vouée à une disparition programmée. Les Français sentent que déclencher la pagaille, comme on le leur suggère partout, est bien joli mais leur coûtera cher et ne profitera qu’aux… profiteurs.
25 Oct 2010 4:47 4. Houzi
Une belle intervention du député Jean-Pierre BRARD:
http://www.youtube.com/watch?v=gXxunFtl_aA
Je sais, ça ne va pas faire plaisir à Diego qui pourra toujours se consoler en lisant les pages saumon du FIGARO.
Quant à INFRANIOUZES, je l’invite à aller vérifier auprès de la BOURSE si en FRANCE, il est interdit d’entreprendre et où sont les « profiteurs » !
25 Oct 2010 8:16 5. drazig
J’ajouterais, Infraniouzes, que d’accusations en repentances, de « politiquement correct » en gardiens de la bien-pensance, notre pays a perdu le moral et n’ose plus. C’est le reproche majeur que je fais à nos dirigeants depuis 30 ans et plus.
25 Oct 2010 10:29 6. wassala
Houzicratie…! Houzinagaz…! (_*_)
Il est de plus en plus clair que moins de 5% de la masse salariale active tient le pays en otage et ruine l’économie…!
Tout est déjà tellement volatile et imprévisible dans le monde économique extérieur qui entoure ce pays qui décline à vue d’œil…
L’Etat semble impotent à exiger la sécurité de la majorité qui souhaite simplement travailler, se déplacer…vivre!
Je pense que cela ne se produit pas ailleurs qu’en France, il va falloir créer des cellules actives de salubrité publique pour éradiquer ces furoncles qui infectent quotidiennement la France.
Furoncles privilégiés prenez garde! Le peuple n’est pas votre propriété… Il pourrait bien perdre patience ! Et procéder à des opérations chirurgicales… sans anesthésie!
25 Oct 2010 22:24 7. arlette
La retraite à 62 ans. La majorité des gens était bien d’accord sur ce point. Cependant, c’est le mépris avec lequel notre Président traite les interlocuteurs qui a mis le feu aux poudres. Mais il n’est pas le plus responsable de cette gabegie.
En l’occurrence : premières ânerie :
Mitterrand abaisse l’âge de la retraite à 60 ans alors que personne ne demandait rien. Pour une fois !!!
Deuxième ânerie :
les 35 h de Martine Aubry, Là encore personne ne demandait rien ;
et bien d’autres allocations qui devraient être revues à la baisse.
Car,qui les paie « ces alloc » ? Les productifs. C.à d., en premier les entreprises qui doivent trouver l’argent pour payer l’URSSAF et Cie, en deuxième les ouvriers et employés par un manque à gagner.
Conclusion les entreprises se sont expatriées,le chômage s’est aggravé et les aides ont été encore plus importantes. C’est le tonneau des Danaïdes.
La gabegie dans toute sa splendeur. Malheureusement elle ne s’arrête pas qu’au social.
25 Oct 2010 22:25 8. arlette
Oui, bien sûr, le politiquement correct.