Tapie président!
Jean-Michel Baylet, président des radicaux de gauche vient de faire savoir que son parti entendait bien être présent lors des prochaines présidentielles de 2012 et qu’il pensait à Bernard Tapie pour porter ses couleurs.
Dans un premier temps, bien sûr, on rigole des ambitions de ce parti croupion et du choix d’un repris de justice pour le représenter dans la compétition suprême de notre démocratie.
Mais, à la réflexion, les choses sont moins drôles.
D’abord, il est un peu triste que les héritiers (en partie, car depuis la scission de 1972, il y a aussi les radicaux de droite) du plus vieux parti de France en soient arrivés là. Le radicalisme, de Clemenceau à Mendès-France, en passant par Herriot et Edgar Faure, a longtemps dominé notre vie politique avec la laïcité, ses liens étroits avec la franc-maçonnerie, son ambiance de préaux d’école et son arrière-goût de cassoulet. Le gaullisme puis la renaissance du PS l’ont tué.
Ensuite, la démarche, bien dérisoire, de Baylet rappelle qu’aujourd’hui un parti politique qui n’est pas présent lors des présidentielles, ne serait-ce qu’en faisant de la figuration, disparaît totalement de l’échiquier.
Et la réforme du quinquennat avec des présidentielles suivies, dans la foulée, par les législatives a considérablement aggravé les choses. Ceux qui n’ont pas été dans le coup lors des présidentielles n’ont guère de chance d’avoir des élus à l’Assemblée, les législatives devenant, de plus en plus, et jusqu’à preuve du contraire, une formalité permettant de donner au président élu une majorité confortable au Parlement.
Baylet se souvient que c’est grâce à Christiane Taubira et ses 2,3% aux présidentielles de 2002 qu’on a (un peu) parlé des radicaux de gauche. D’autant plus que cette candidature de témoignage a permis (avec celle de Chévènement) d’éliminer Jospin dès le premier tour. Le PRG a, évidemment, encore un pouvoir de nuisance que Baylet aimerait sans doute pouvoir monnayer avec le PS.
Mais Baylet se souvient surtout des élections européennes de 1994 où la liste PRG, avec 2.340.000 voix et 12%, a remporté 13 élus. Dernier et incroyable succès des radicaux de gauche. Or, cette liste était menée par un certain Bernard Tapie.
Que cet ancien chanteur yéyé, devenu homme d’affaires douteux, puis responsable sportif véreux, puis député, puis ministre (de la Ville et de François Mitterrand), puis détenu de droit commun, avant de se retrouver acteur de feuilletons télévisés soit un personnage pour le moins sulfureux n’a guère d’importance pour le président du PRG.
Tapie est connu, on le voit à la télévision, il a du bagout, fait rire les foules comme tous les bons bateleurs d’estrade et sait jouer les moralistes redresseurs de torts comme beaucoup d’anciens tôlards.
Sénateur inamovible du Tarn-et-Garonne, propriétaire de « La Dépêche du Midi », Baylet connaît bien une certaine France profonde. Il sait que le PRG vaut à peine 2% mais qu’avec son « frère » Tapie, ce commis voyageur maître du populisme, il peut espérer 7 ou 8%. Ce serait la première fois qu’un ancien tôlard se présenterait à la fonction suprême de la République. Preuve que nous n’avons pas encore tout vu.
Mais on peut penser que Baylet espère surtout échanger cette menace contre quelques sièges que lui accorderaient ses amis socialistes lors des législatives.
Toujours est-il que voir les successeurs de Mendès-France présenter Tapie à la présidentielle donne une curieuse idée de l’état de décomposition morale de notre pays.
Mots-clefs : Baylet, Présidentielles, Tapie
05 Sep 2010 6:01 1. Houzi
Du même tonneau, BALKANY réélu haut la main par ceux dont il avait fait les poches.
Difficile après, d’aller faire la morale aux jeunes qui s’interrogent sur le modèle à suivre pour réussir.
05 Sep 2010 8:38 2. Infraniouzes
Voilà pourquoi – et vous l’expliquez très bien – la vie politique et les élus dégoûtent de plus en plus les Français qui se replient dans une abstention prudente.
Tous ces hommes n’ont rien à proposer à leur concitoyens, sinon qu’on vote pour eux et que leur petite tambouille continue de mijoter à leur seul profit.
Ils n’ont que des capacités de nuisances à vendre au plus offrant.
05 Sep 2010 10:05 3. Infraniouzes
J’ai oublié l’essentiel: L’inénarrable Baylet n’a pas choisi Tapie au hasard. C’est que le bougre est pété de thunes, il pourra financer sa campagne tout seul, la contribution de Baylet et de ses vieux radicaux-socialistes bouffeurs de curé se limitant à quelques centaines de militants rassis et surtout, quelques porte-plume pour écrire les discours que notre Bernard national serait bien incapable de rédiger. Il est pas beau l’équipage ?