Mitterrand était un maniaque des services secrets et n’hésitait jamais à se servir de nos agents les plus spéciaux pour des raisons toutes personnelles et qui n’avaient rien à voir avec la défense des intérêts de la France.
On se souvient que le SDEC, la DST et toutes les autres officines plus ou moins officieuses avaient été mis sur le pied de guerre pour écouter, suivre, pourchasser, persécuter tous ceux qui s’intéressaient à l’existence de Mazarine. On n’a d’ailleurs jamais su comment Jean-Edern Hallier (qui avait été le premier à découvrir le secret de « la fille cachée ») était mort… en faisant de la bicyclette. Mais les barbouzes de l’Elysée s’occupèrent aussi des journalistes qui enquêtaient sur les Irlandais de Vincennes, l’affaire de Green Peace, la mort de Bérégovoy ou celle de Grossouvre.
Pour Mitterrand, les journalistes dits « d’investigation » étaient des « ennemis de l’intérieur » qu’il ne fallait pas quitter des yeux et sur lesquels il fallait tenter de tout savoir afin non seulement de découvrir leurs sources d’information mais aussi, bien sûr, de pouvoir éventuellement exercer sur eux des pressions, voire du chantage.
On pensait cette époque révolue. Non pas parce que la morale la plus élémentaire aurait fait des progrès mais parce que ces histoires de pieds nickelés avaient toujours dégénéré en pantalonnades ridiculisant le régime.
Eh bien on apprend, aujourd’hui, que Nicolas Sarkozy a le même penchant que Mitterrand pour les écoutes clandestines, les filatures discrètes et le sale petit boulot minable des cabinets noirs.
Il faisait espionner par nos James Bound en peau de lapin les journalistes du Monde qui suivaient l’affaire Woerth.
En principe, nos barbouzes avaient pour mission de découvrir la « taupe » qui, au sein de la justice ou de la police, informait le journaliste du Monde et avait notamment permis au quotidien du soir de publier les déclarations que Patrice de Maistre, le conseiller de Liliane Bettencourt, avait faites sous le sceau du secret de l’instruction.
Il semble que l’informateur ait été repéré puisque l’un des magistrats chargés du dossier a été « promu » à Cayenne, célèbre pour son bagne.
Mais il est évident que nos petits détectives présidentiels avaient aussi pour mission de dénicher quelques détails croustillants et un peu scabreux, quelques vices cachés dans la vie personnelle de ces journalistes indiscrets pour mieux les inciter au silence.
Ces méthodes sont évidemment condamnées par la loi, une loi que Sarkozy lui-même a d’ailleurs fait passer et qui garantit la protection des sources des journalistes.
Mais l’affaire dénoncée aujourd’hui à la « une » du Monde (et démentie par l’Elysée) est surtout révélatrice de toute une ambiance.
On s’affole au Palais. On sait parfaitement que Woerth n’est « pas net » dans cette affaire, que ses relations avec le conseiller de la plus grosse fortune de France dépassaient de beaucoup le cadre des lointaines mondanités et qu’à force de tirer les fils de cette pelote nauséabonde, les journalistes par trop curieux risquent bien de faire vaciller ce système où combines, corruption, « magouillages et copinages » font si bon ménage.
Et alors on en revient aux bonnes vieilles méthodes, chères, jadis, à un ministre du Budget qui, alors qu’il faisait campagne pour Edouard Balladur, n’hésitait pas à menacer d’un contrôle fiscal tous les journalistes insensibles aux charmes balladuriens.
C’est scandaleux mais surtout pitoyable.
Et pendant ce temps-là, le chef de cabinet adjoint du premier ministre se saoule la gueule et injurie les policiers et le ministre de l’Immigration épouse « clandestinement » une immigrée de 28 ans sa cadette.

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